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"À chaque fois on se fait avoir par les Anglais, ça va clasher": le courroux des pêcheurs français après les annonces de la ministre de la Mer

La ministre de la Mer a évoqué un plan d'indemnisation pour les pêcheurs français qui ne pourraient plus travailler à cause du Brexit, faute de licence. Impensables pour eux alors qu'officiellement, les négociations entre Paris et Londres sont toujours en cours.

L'annonce a fait l'effet d'une bombe aux assises de la mer organisées hier jeudi à Saint-Pol-de-Léon (Finistère). La ministre de la Mer Annick Girardin a évoqué un plan d'indemnisation pour les pêcheurs français qui ne pourraient plus travailler à cause du Brexit, faute de licence pour pêcher dans les eaux britanniques.

Pour les pêcheurs français, cela sonne comme un aveu de défaite de la part du gouvernement, alors qu'officiellement les négociations entre Londres et Paris sur les licences de pêche continuent: "Ils abandonnent le combat, ils nous laissent tomber. Ça fait onze mois qu'ils nous disent qu'ils vont obtenir les licences et que faute d'obtention, il y aura des mesures de rétorsion. Aujourd'hui on n'a pas les licences et il n'y a pas de mesures de rétorsion", déplore Pierre Vogel pêcheur à Saint-Malo (Ille-et-Vilaine). D'autant que ces eaux britanniques lui sont essentielles: "La pêche dans les eaux britanniques, c'est 30% de notre chiffre d'affaires".

Et aujourd'hui le temps presse. Pour Olivier Le Nezet, président du comité régional des pêches de Bretagne, il faut continuer à négocier, à obtenir les licences, le plus rapidement possible: "Ce qui est important c'est que le président de la République prenne des décisions qui s'imposent avant même que l'on prenne la présidence de l'Union européenne en début d'année. Car avec cette présidence, la France n'aura plus de levier pendant 6 mois pour défendre les intérêts français".

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"Les trois quarts du temps entre Français et Anglais, ça se finit à coups de fusil"

D'autant que l'enveloppe promise par la ministre de la Mer, 40 à 60 millions d'euros, est dérisoire: "C'est une connerie. On a des jeunes qui ont investi 3 millions d'euros dans des navires, je les vois mal y renoncer. L'enveloppe ne représente que 10 bateaux", tacle William Dewismes, président du syndicat CFTC marins-pêcheurs, qui n'est même pas surpris et très en colère: "On s'y attendait quand on n'a vu que rien ne se mettait en place. À chaque fois on se fait avoir par les Anglais. Ils ne respectent pas leurs accords, comme d'habitude. Le seul politique qui faisait quelque chose pour la pêche, c'était Chirac. Les autres, il leur manque des 'couilles'".

Et aujourd'hui, William Dewismes craint que la situation s'envenime avec les pêcheurs anglais: "Soit on va s'endormir, soit cela va se réveiller. J'ai peur que certains pêcheurs 'montrent les muscles'. On ne veut pas en découdre, mais à un moment, ça va clasher", prédit le syndicaliste. "Les trois quarts du temps entre Français et Anglais, ça se finit à coups de fusil", ajoute-t-il.

Face au tollé, la ministre de la Mer Annick Girardin, a passé une heure en fin de journée avec les professionnels du secteur. La "priorité du gouvernement est d'obtenir des licences", mais "cela n'empêche pas de prévoir l'avenir de la filière", y compris en indemnisant ceux qui resteraient à quai, a-t-elle insisté.

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Rémy Ink avec Guillaume Dussourt