"Lamentable", "nécessaire": l'action écologiste sur la Joconde divise

Après avoir été entartée en mai 2022, la Joconde a été visée, ce dimanche, par de la soupe. Deux militantes écologistes du collectif Riposte alimentaire ont déversé cette préparation sur la vitre de protection du tableau. Un mode d'action qui est loin de faire l'unanimité.

De la soupe lancée sur la vitre de protection de la Joconde... La scène suscite de vives réactions dans la salle d'exposition. Les deux militantes, elles, se tiennent debout de chaque côté de l'oeuvre.

Les deux femmes déclarent alors: "Qu'est-ce qui est important? Qu'est-ce qu'il y a de plus important? L'art ou le droit à une alimentation saine et durable? Notre système agricole est malade. Nos agriculteurs meurent au travail. Un Français sur trois ne fait pas tous ses repas tous les jours". Elles portent un tee-shirt sur lequel est écrit le nom de leur collectif, "Riposte alimentaire", qui a revendiqué l'action sur X.

Les deux femmes ont été interpellées et placées en garde à vue pour dégradation d'un bien classé ou inscrit, a précisé le parquet de Paris. Elles avaient caché la soupe dans leur thermos à café.

Un mode d'action qui divise

Les actions comme celles-ci se multiplient ces dernières années. Elles sont parfois "nécessaires" selon Émilie, une visiteuse: "Moi je ne le ferais pas parce que j'ai quand même un grand respect pour l'art. Le souci, c'est que l'on peut toucher des gens que comme ça. La plupart du temps, les gens ne vont pas s'en rendre compte tant qu'on ne fait pas des actions importantes"

Invité d'Apolline Matin ce lundi sur RMC, Simon, "citoyen engagé" de Riposte alimentaire, rappelle que "la question n'est pas de choisir entre l'art et une alimentation saine et durable, c'est d'interpeller": "Le plus important, c'est de se poser la question de ce qui dérange les gens aujourd'hui".

"On n'a pas recouvert la Joconde de soupe, on a mis de la soupe sur une vitre", précise-t-il.

Pour ce militant écologiste, cette action permet de "se poser la question de ce qui nous indigne le plus". "Moi je choisis d'être indigné par les problématiques d'accès à l'alimentation et je choisis de faire en sorte qu'on en parle aujourd'hui. On en parle grâce à cette action", précise Simon.

Malgré tout, certains visiteurs du musée, comme Elisa, ne comprennent pas le but de cette action: "Je ne vois pas le lien entre les enjeux écologiques et la Joconde". D'autres sont plus durs:

"C'est scandaleux. La Joconde n'a rien fait. Ce n'est pas elle qui détruit la planète. Je trouve ça lamentable", se désole Paul.

"Les gens ne vont pas forcément comprendre"

Pour Jean-David Abel, responsable de l'association France Nature Environnement, ce mode d'action n'est pas le bon: "Les gens ne vont pas forcément comprendre. Je ne parle même pas des gens de la culture et du musée lui-même, mais même des gens très loin, qui sont au fond de la Bretagne ou des Alpes."

"Qu'est-ce qu'ils vont retenir de tout ça? Ils voient une image qui se rajoute à d'autres images. Il y a déjà beaucoup de brouhaha. Là, on rajoute encore du spectacle en plus, c'est dommage", ajoute-il.

La ministre de la Culture Rachida Dati a également réagi sur X. "La Joconde, comme notre patrimoine, appartient aux générations futures. Aucune cause ne peut justifier qu'il soit pris pour cible", peut-on lire dans son message.

"Je ne suis pas sûre que la Joconde soit la plus grande pollueuse de France. Ça rime à quoi?", a de son côté dénoncé la porte-parole du gouvernement Prisca Thévenot, sur la chaîne de télévision France 3.

Tanguy Roman-Clavelloux