Crèches privées: nourriture, couches, maltraitances… ce que contient le livre de Victor Castanet

Le nouveau livre de Victor Castanet, "Les Ogres" (Flammarion), sort ce mercredi en librairie. Après avoir fait trembler les Ehpad et le groupe Orpéa avec "Les Fossoyeurs" en 2022, sur le business du grand âge, le journaliste se concentre cette fois sur les crèches privées. Victor Castanet dénonce les failles d’un système lucratif au détriment de l’Etat et des parents, de l'argent public détourné de son but premier, ainsi qu'une prise en charge "low cost" des enfants dans certaines crèches.
Une stratégie d'optimisation des coûts qui s'étend à toutes les lignes comptables. Pour la nourriture, "on doit désormais commander 5% de repas en moins par rapport au nombre d’enfants inscrits", assure l'employée d'une crèche privée. Idem pour les couches, il faut faire des économies. Une directrice lâche à ses équipes: "On ne change pas un enfant pour un petit pipi". Certains salariés décident alors d'aller au supermarché et faire ces courses sur leur argent personnel.
Dans certaines crèches, il y a des problèmes de chauffage, des soucis avec la machine à laver, le four ou le stérilisateur. Des matelas sont défectueux, arrachés, assurent des employés. Emblème du "low cost", la notion de "qualité perçue" revient souvent dans cette enquête. Il semble plus important par exemple d'acheter une plante verte et un fauteuil, pour faire joli dans l'entrée d'une crèche, que des jouets pour les enfants.
Traces de violences
Plusieurs témoignages chocs sont aussi rapportés par Victor Castanet. Il a longuement rencontré Zohra, qui avait pris la parole en premier sur RMC pour raconter le calvaire de ses enfants accueillis dans une crèche qui appartient au groupe People and Baby dans la région lilloise. Traces de violences sur le corps, griffures sur l'épaule... Des marques provoquées par un adulte, constate un médecin. Une autre famille dont les enfants sont eux aussi passés par cette même crèche constate les mêmes marques sur le corps, mais aussi des bébés affamés qui se jettent sur des paquets de gâteaux une fois rentrés à la maison... Des enfants visiblement sous-alimentés à la crèche.
Autre témoignage, celui d'un couple dont le fils est gardé dans une crèche parisienne du groupe People and Baby. Après avoir recueilli les aveux d'une salariée qui dénonce les comportements inadaptés de ses collègues (enfants laissés seuls sans surveillance, nourris avec des yaourts périmés, oreilles tirées…), le couple portera plainte en octobre 2023 avec trois autres familles.
Autre crèche à Lyon et nouvelle situation problématique: un nourrisson de 4 mois et demi est retrouvée couverte de grandes traces sur le visage, possiblement causées par un adulte. Les parents accusent la direction de l'établissement de maltraitances et de dysfonctionnements. Des accusations que le groupe People and Baby nie, préférant menacer les parents d'une plainte en diffamation.
People and Baby promet des audits indépendants
Selon les informations de RMC, les crèches privées Babylou, People and Baby, Les petits chaperons rouges ou La maison bleue ont engagé une agence de communication pour affronter la sortie du livre. Certains ont même communiqué dès ce lundi auprès de leurs salariés.
"Le livre présente de graves accusations à l’encontre de People & Baby ainsi que de son fondateur et ancien dirigeant, Christophe Durieux, indique ce groupe de son côté. Nous prenons ces révélations extrêmement au sérieux, et les pratiques décrites dans l’ouvrage nous choquent profondément, car elles sont en décalage total avec les valeurs que nous portons aujourd’hui. [...] Des audits indépendants seront mis en place pour examiner en détail nos pratiques, et nous nous engageons à rendre compte de manière transparente des actions mises en œuvre et de leur suivi."
En 2023, un rapport de l’Inspection générale des affaires sociales (Igas) alertait face à la "maltraitance institutionnelle" pesant sur le personnel des crèches et demandait un "changement culturel" au sein de ces établissements. Selon Victor Castanet, l’ex-ministre de la Famille Aurore Bergé a pesé de tout son poids pour empêcher la tenue d'une mission d’enquête parlementaire visant à clarifier les dysfonctionnements dans les crèches privées.