"Je demande juste à faire mon métier": enseignant handicapé, il est affecté à 250 km de son domicile

Il y a deux ans, Pierre était enseignant de cuisine dans un lycée professionnel hôtelier à Quimper. C'est à quelques kilomètres de la préfecture du Finistère que lui et sa femme, aussi enseignante dans la région, ainsi que leur fille de trois ans, vivent, à Pluguffan. Atteint de pied bot, une malformation qui le fait beaucoup souffrir, il est reconnu travailleur handicapé.
D’abord contractuel de l’Education nationale, Pierre décide de passer le concours de titulaire l’année dernière. A la rentrée 2022, il est envoyé à 600 km de chez lui, à Bordeaux, pour son stage obligatoire d’un an. Avec des conséquences importantes pour lui, puisqu'il a été éloigné de sa famille et dit ne pas avoir "pu (se) soigner de l'année".
Mais Pierre ne désespère pas et se dit qu’à l’issue de son stage, il sera forcément affecté dans son académie et pourra rentrer auprès de sa famille. Mais rien ne s’est passé comme prévu. Pierre a été affecté dans l’académie de Nantes, à 250 km de son domicile, alors qu'il peut difficilement se déplacer en voiture.
"Ils sont peut-être passés à côté de l'urgence de ma situation"
"Cette année, je l'ai payée sur tous les plans: affectif, émotionnel, physique, financier… Je me suis accroché toute l'année en me disant que c'est un sacrifice mais qui sera bénéfique avec une issue favorable, mais il s'avère que le ministère n'a pas ouvert de poste dans l'académie (de Rennes, dont dépend Quimper)" explique-t-il.
"Ils sont peut-être passés à côté de la particularité, de l'urgence de ma situation. Je demande juste à faire mon métier."
Un recours et un engagement
Pierre a fait un recours auprès de son académie, qui doit être étudié la semaine prochaine. Comme travailleur handicapé, il est tout en haut du classement de son académie. Si un poste est ouvert, il doit alors être pour lui. Des places en enseignement hôtelier existent, sauf qu'elles sont actuellement occupées... par des contractuels.
RMC a interrogé le rectorat qui renvoie vers le ministère de l’Education ,ationale. C’est lui qui ouvre des postes de titulaires ou non chaque année, en fonction des besoins et des ressources. En réponse à notre sollicitation, le ministère expliquait, lundi soir, s’engager à "examiner avec attention (le cas de Pierre) pour voir si une solution peut être envisagée".
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La place du handicap dans l'Éducation nationale
En termes de handicap, le ministère de l'Éducation nationale est loin d'être exemplaire. D’abord, il a longtemps bénéficié d’un régime spécial et n’est obligé d’employer du personnel handicapé que depuis 2021: ainsi, le taux d'emploi dépasse à peine les 3,5% en 2020, loin de l’objectif de 6% inscrit dans la loi.
Enfin, pour les enseignants handicapés qui ont eu la chance d’entrer à l’Education nationale, tout n’est pas rose. Il y a un an, 300 d'entre eux lançaient un SOS à Jean-Michel Blanquer, alors ministre, pour réclamer une meilleure prise en compte de leurs besoins. Leur pétition avait récolté 19.000 signatures, mais est restée lettre morte. Quelques mois plus tard, c’est au nouveau ministre Pap Ndiaye qu’ils ont adressé un courrier, resté lui aussi sans réponse.
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