"Le manque à gagner est de 30.000 euros": quand le mariage divise l'allocation adulte handicapé
L'Allocation Adulte Handicapé (AAH) arrive à l'Assemblée nationale, alors que les députés doivent débattre des mesures proposées dans le cadre de la loi pouvoir d'achat. Et il y a urgence, puisque environ 250.000 personnes ne bénéficient pas de l'Allocation Adulte Handicapé à son niveau maximum... parce qu'ils sont en couple.
Et c'est assez rare pour le souligner, mais l'ensemble des élus ont affiché un "consensus" sur la "déconjugalisation" de l'AAH, c'est-à-dire l'attribution de cette aide aux adultes handicapés sans tenir compte des revenus du conjoint.
Car pour les personnes en situation de handicap, l'AAH est calculée en fonction des revenus du conjoint, ce qui rend la dépendance plus grande. C'est le cas de Meriem, 42 ans, qui depuis sa naissance souffre d'une polyarthrite et qui ne peut pas travailler.
"J’ai des soins tous les jours, des séances de kiné et des rendez-vous médicaux. Trouver quelqu'un qui vous aime telle que vous êtes en situation de handicap, ce n'est pas facile. Et quand vous trouver ce bonheur, on vous dit que vous allez être pénalisés", explique-t-elle à RMC.
"On subit l’injustice alors qu’on a voulu se marier parce qu’on s’aime"
Car faire ce choix de vivre avec son conjoint depuis sept ans, c'est diviser par deux le montant de son AAH. "Mon mari, je lui demande si on a bien fait de se marier. Depuis qu’on est ensemble, le manque à gagner est de 30.000 euros", estime Meriem.
Pour que sa femme conserve une partie plus importante de son allocation, son mari Nicolas a même pris un poste rémunéré au Smic: "J’ai même quitté mon dernier emploi avec un salaire plus conséquent parce que sinon elle perdait la moitié de son AAH". Une AAH qui baisse si Nicolas touche des primes. "Je suis tributaire de mon mari dans la vie de tous les jours. On subit l’injustice alors qu’on a voulu se marier parce qu’on s’aime".
Et avec le coût de la vie qui grimpe, il y a urgence, s'alarme Mathieu Annereau, le président de l'Association pour la Prise en compte du Handicap dans les Politiques Publiques et Privées, l'APHPP. "On veut et on promeut l’autonomie financière des personnes handicapées. On doit cibler le 1er janvier 2023 pour la mise en place de cette mesure", assure-t-il à RMC.
Mais en cas de vote de cette mesure, la majorité présidentielle espère une entrée en vigueur au mieux en octobre 2023. Pas assez tôt pour Meriem: "Cette loi, on l’attend depuis des années. Cela fait cinq ans que le gouvernement ne veut pas passer cette loi. Madame Cluzel (ancienne secrétaire d'Etat chargée des personnes handicapées, ndlr), à chaque fois, disait: 'C’est normal quand on est marié de s’aider, c’est pour le meilleur et pour le pire'".