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"On nous fait passer pour des assassins": la possible interdiction de l'alcool révolte les chasseurs

Un rapport présenté par les sénateurs sur la sécurité de la chasse propose d'aligner les règles de sécurité routière à la chasse concernant l'alcool et les stupéfiants. Les chasseurs crient à la stigmatisation.

C’est un rapport explosif qui a été présenté ce mercredi par les sénateurs de la mission d’information sur la sécurité de la chasse. Alors que selon ce rapport, 9% des accidents de chasse sont liés à l’alcool, cette mission parlementaire propose "d'interdire l'alcool et l'usage de stupéfiants lors de la chasse".

Elle suggère ainsi d'"aligner le taux d'alcoolémie retenu, l'interdiction des stupéfiants ainsi que leurs sanctions respectives sur les règles en vigueur en matière de code de la route". Il n'y a actuellement pas de limite, mais l'alcoolisation peut être une circonstance aggravante en cas de poursuites après un accident.

Une proposition incompréhensible pour le président de la Fédération nationale des chasseurs, Willy Schraen. "De quel droit réserver ça aux chasseurs, un mec bourré sur un vélo c'est dangereux aussi", argue-t-il à l'AFP (même s'il est également interdit de rouler ivre à vélo, ndlr).

"La chasse, ce n’est plus du tout cela"

Même colère dans le Sud-Ouest, où la chasse a repris le week-end dernier. Du haut de ses 55 années d'expérience de chasse, Alain Messal est dépité. Pour lui, "trop c’est trop", il en a marre d’être montré du doigt.

"On nous fait passer pour des assassins, on est dans la caricature, sur des choses qui sont infondées. Aujourd’hui, le chasseur, ce n’est pas un alcoolique, ce n’est pas vrai ! La chasse, ce n’est plus du tout cela", assure-t-il.

Alain fait partie des 11.000 chasseurs de la Haute-Garonne, fédération que préside Jean-Bernard Portet, surpris par les conclusions de ce rapport : "A ce jour, il ne m’a été signalé aucun cas d’alcoolémie sur les chasseurs quand ils pratiquent leur passion".

Et pas d’accident de ce genre dans le secteur, mais le président suivra les directives: "Nous n’avons, nous les chasseurs, rien à cacher. En tant que citoyen et chasseur, je ne m’opposerai en aucune façon à quelque contrôle que ce soit".

Pour le rapporteur de la mission, le sénateur Patrick Chaize (LR), "il faut clarifier la situation" car "l’alcool n’est pas interdit à la chasse". "L’objectif est donc de corriger cette situation", et permettre des contrôles d’alcoolémie qui pourraient être assurés notamment par des gardes-forestiers.

Pas de "jours sans chasse" dans le rapport

La mission sénatoriale avait été constituée en novembre dernier, après une pétition sur le site du Sénat ayant rassemblé plus de 120.000 signatures, lancée par le collectif "Un jour un chasseur", créé à la suite de la mort d'un jeune homme de 25 ans, Morgan Keane, "abattu par un chasseur alors qu'il coupait du bois dans son jardin" dans le Lot.

Sur les jours sans chasse, prônés lors de la campagne présidentielle par les candidats Yannick Jadot et Jean-Luc Mélenchon, la mission a rejeté "une règle nationale uniforme", tout en se disant "convaincue que localement des demandes doivent être entendues".

Parmi les 30 propositions, figurent également des mesures pour renforcer la formation, sans remonter l'âge d'obtention du permis mais en "généralisant le tutorat", ou encore l'obligation de passer un brevet de premier secours et un examen médical annuel. "C'est la douche froide. De EELV ou LFI, ça ne m'aurait pas surpris... Il ne manque que la proposition de ficher S tous les chasseurs...", souffle Willy Schraen.

Pour la saison 2021-2022, l'Office français de biodiversité (OFB) a recensé 90 accidents de chasse au total (blessures corporelles liées à l'utilisation d'une arme de chasse), dont huit mortels.

J.A. avec Jean-Wilfrid Forquès