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Chute de Bachar al-Assad en Syrie: pourquoi il ne faut pas crier victoire trop vite

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Alors que Bachar al-Assad s’est réfugié à Moscou, le monde occidental se félicite à juste titre de la chute d’un homme qui était devenu le bourreau de son peuple. Mais pour l’écrivain et éditeur Arthur Chevallier, il est un peu trop tôt pour crier victoire…

La fin des dictatures, c’est toujours la même chose. On sait ce qu’on perd, mais on ne sait pas ce qu’on gagne. On ne regrettera pas Bachar al-Assad, mais il est trop tôt pour se réjouir. Le nouveau pouvoir à Damas, ce mélange bizarre de djihadistes repentis, ça ne fait pas non plus rêver. Il ne suffit pas de chasser un dictateur pour avoir la démocratie.

Il n’y a qu’à voir les révolutions du printemps arabes. Quinze ans après, c’est mitigé. La Libye est devenue un foyer de terroristes et une rampe de lancement pour les migrants. En Egypte, le maréchal al-Sissi est élu, mais ça ressemble quand même à une dictature militaire. Quant à la Tunisie, c’est là que ça s’est le moins mal passé. Depuis la chute du président Ben Ali, il y a eu quelques gouvernements prometteurs. Mais tous ont échoué à rétablir l’ordre et à guérir la pauvreté. Et le président actuel détricote l’Etat de droit en emprisonnant ses opposants. Donc pour l’instant, ce n’est pas reluisant.

La matinale 100% info et auditeurs. Tous les matins, Apolline de Malherbe décrypte l'actualité du jour dans la bonne humeur, avec un journal toutes les demies-heures, Charles Magnien, le relais des auditeurs, Emmanuel Lechypre pour l'économie, et Matthieu Belliard pour ses explications quotidennes. L'humoriste Arnaud Demanche vient compléter la bande avec deux rendez-vous à 7h20 et 8h20.
L'avis tranché d'Arthur Chevallier : Chute de dictateurs, ne pas crier victoire trop tôt - 10/12
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L'avenir n’appartient pas forcément à la démocratie…

On ne peut pas non plus en vouloir aux peuples de vouloir se débarrasser des tyrans. Aux peuples, non. Mais à l’Occident, oui. On a beaucoup joué à l’apprenti sorcier. Aider les résistants, c’est bien, mais il faut assurer derrière. A une époque, quand on faisait tomber une dictature, on la récupérait et on en faisait une démocratie. Après la chute de l’URSS, les pays communistes se sont débarrassés de leurs dictateurs. En Roumanie, Ceausescu tombe en 1989. En Pologne, le général Jaruzelski quitte le pouvoir en 1990. En Allemagne de l’Est, le régime tombe après la chute du mur de Berlin. Ces pays, on va les intégrer à l’Union européenne et les transformer en démocratie. On a pu le faire grâce à une chose: l’argent. Maintenant, on est de plus en plus pauvres, donc c’est plus compliqué.

On n’a plus les moyens de nos ambitions. La géopolitique, ce sont des rapports de force. On ne choisit pas la démocratie pour ses beaux yeux, mais parce qu’elle permet de s’intégrer dans un système puissant, de s’enrichir et de vivre en paix. Si on finance une révolution, il faut pouvoir apporter tout ça. Sinon, des dictateurs remplaceront d’autres dictateurs.

Donc l’avenir n’appartient pas forcément à la démocratie… Le règne de la démocratie libérale depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, c’est la paix la plus longue en Europe depuis l’Empire romain. Ce n’est pas une situation normale, c’est une situation exceptionnelle. Il va falloir apprendre à vivre avec des régimes qui ne nous ressemblent pas, et qui parfois nous détestent. Ça s’appelle le basculement du monde, ce n’est pas une bonne nouvelle, mais c’est la réalité.

Arthur Chevallier