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Nanterre: "Peut-être un refus d'obtempérer, mais cela ne justifie pas un meurtre" selon un avocat

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Selon l'avocat Raphaël Kempf, invité d"Apolline Matin" ce mercredi sur RMC et RMC Story, le possible refus d'obtempérer ne peut pas suffire à expliquer le tir mortel d'un policier contre un jeune automobiliste la veille à Nanterre.

Naël, 17 ans, est mort ce mardi matin à Nanterre après le tir d'un policier à bout portant, à la porte de la voiture qu'il conduisait. Dans leur première version, les policiers avaient affirmé que le véhicule leur avait foncé dessus mais des vidéos de la scène ont ensuite circulé et montré que les motards étaient sur le côté de la voiture quand elle a redémarré. L'auteur du tir, un policier âgé de 38 ans, a été placé en garde à vue. Une enquête a été ouverte pour homicide volontaire par personne dépositaire de l'autorité publique, confiée à l'IGPN. Une autre enquête concerne le conducteur décédé, pour refus d'obtempérer et tentative d'homicide volontaire sur personne dépositaire de l'autorité publique. 

Selon l'avocat Raphaël Kempf, le refus d'obtempérer ne peut pas justifier un tir mortel. "Le terme de meurtre, qui peut être qualifié d'homicide volontaire, c'est le fait de tuer avec l'intention de tuer, explique-t-il dans 'Apolline Matin' ce mercredi sur RMC et RMC Story. Je ne veux pas parler de ce dossier à la place de leurs avocats. Mais hier (mardi), comme dans un grand nombre de dossiers de meurtres policiers, le policier fait usage d'une arme qu'il sait être une arme létale, c'est-à-dire qu'il peut tuer, en direction du corps d'un individu. Il y a dans ce cas-là une intention d'homicide. C'est ce que disent les juges pour n'importe qui qui ferait usage d'une arme en direction d'une personne. S'il la tue, c'est un meurtre. Si elle ne meurt pas, c'est une tentative de meurtre. Ce que je dis là, c'est du droit et rien que du droit. C'est l'application stricte du code pénal et de la jurisprudence."

"Le fait qu'il y ait un refus d'obtempérer n'est pas exclusif du fait qu'il s'agisse d'un meurtre, ajoute-t-il. Il peut y avoir un refus d'obtempérer et l'enquête démontrera si oui ou non il y en a un. J'ai été très touché par l'émotion de ses avocats, qui étaient scandalisés que le parquet de Nanterre ait décidé d'ouvrir une enquête sur le conducteur, alors même qu'il est décédé. C'est une situation ahurissante où on enquête sur des morts. Il y a peut-être eu un refus d'obtempérer mais cela ne justifie pas un meurtre. Il faut bien comprendre que d'un point de vue juridique, il y a un meurtre ou un homicide volontaire. Et dans un deuxième temps, il pourra être éventuellement justifié par la légitime défense ou par la loi de 2017. Mais dans ce cas, comme dans un grand nombre d'autres cas, cela me paraitra extrêmement difficile à justifier."

"La police ne doit pas tuer des gens, des enfants, parce qu'ils ont un antécédent de défaut de permis ou de refus d'obtempérer"

En 2022, 13 décès ont été enregistrés après des refus d'obtempérer lors de contrôles routiers, un record. "Dans ce pays, la police ne doit pas tuer des gens, des enfants, parce qu'ils ont un antécédent de défaut de permis ou de refus d'obtempérer", souligne Me Raphaël Kempf, qui comprend qu'au niveau politique, Jean-Luc Mélenchon, pointe une forme de "peine de mort" dans ces situations. "C'est une formule politique et qui peut avoir effectivement un peu de sens, confirme l'avocat. D'une certaine manière, l'accumulation de meurtres policiers au cours de refus d'obtempérer envoie le signal 'attention, si vous refusez d'obtempérer, vous pouvez être tué'. Juridiquement, ce n'est pas une peine de mort, mais ça peut envoyer ce signal-là. Juridiquement, il faut parler de meurtre policier pour appeler un chat, un chat. C'est juste du droit."

LP