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Police-Justice

"La syndicaliste": l’étrange affaire Maureen Kearney, syndicaliste d’Areva violée, adaptée au cinéma

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La France insoumise demande l’ouverture d’une enquête parlementaire sur l’affaire dite de "la syndicaliste". Une affaire qui fait l’objet d’un film qui sort ce mercredi en salles.

C'est une histoire qui pourrait être un scandale d’Etat selon la France Insoumise à l'Assemblée nationale. L'affaire dite de "la syndicaliste" concerne deux femmes qui ont été agressées et violées, peut-être pour s'être mêlées de gros contrats à l’international.

La première de ces femmes s’appelle Maureen Kearney, elle était syndicaliste chez Areva, le géant français du nucléaire. D’origine irlandaise, rentrée dans l’entreprise comme prof d’anglais, elle est devenue représentante de la CFDT et en même temps proche de la présidente de l’époque Anne Lauvergeon. Très entreprenante, la syndicaliste avait aussi beaucoup de relations dans le monde politique. Elle connaissait et tutoyait par exemple François Hollande et Bernard Cazeneuve.

En 2012, elle est informée d’un très gros contrat qu’Areva s'apprête à signer avec EDF et un groupe nucléaire chinois. Maureen Kearney pense que ce contrat va nuire aux intérêts des salariés d’Areva et elle tente de s’y opposer. 

C’est à ce moment-là qu'elle subit une étrange et terrible agression. Elle est agressée par un homme chez elle. Il la ligote, lui inscrit la lettre A sur le ventre avec la lame d’un couteau, puis lui enfonce le manche d’un couteau dans le vagin et c’est ainsi qu’elle sera retrouvée plusieurs heures après.

Isabelle Huppert dans le rôle de Maureen Kearney

L’affaire est prise très au sérieux par le ministère de l'Intérieur, mais rapidement, les gendarmes soupçonnent Maureen Kearney d'avoir mis en scène son agression. De victime, elle devient coupable. Elle est jugée pour "dénonciation mensongère", condamnée en première instance, mais relaxée par la cour d’appel de Versailles en 2018.

La justice a donc finalement reconnu la réalité de son agression mais n’a pas été capable d'identifier les auteurs ni les commanditaires.

C’est cette histoire que raconte le film “La syndicaliste” avec Isabelle Huppert dans le rôle de Maureen Kearney.  Les deux femmes se ressemblent d’ailleurs étonnement.

Une deuxième agression 6 ans plus tôt

Mais l’affaire rebondit aujourd’hui avec la révélation de l’agression d’une autre femme. C’est la journaliste de L'Obs, Caroline Michel Aguirre, qui révèle cette deuxième affaire dans une enquête publiée dans l’hebdomadaire.

Cela se passe cette fois en 2006, également dans l’univers de gros contrats à l'étranger. Cette fois, c'est le groupe Veolia qui s'apprête à créer une filiale au Proche-Orient lorsqu’un de ses cadres, Emmanuel Petit s’y oppose. Ce cadre est alors licencié, mais il écrit au juge Courroy pour dénoncer des faits de corruption. 

Quelques jours après, sa femme est agressée à son domicile. Elle est ligotée et son ventre est scarifié avec la lame d’un couteau. Elle est ensuite agressée sexuellement. C’est exactement le même mode opératoire que celui de l’agression de la syndicaliste d'Areva

Dans l'un des cas, l’agresseur a dit avant de partir: "C’est le dernier avertissement". Dans l’autre cas, il a dit: "C’est le deuxième avertissement et il n’y en aura pas d'autres".

La victime de cette affaire de 2006, la femme du cadre de Véolia, s’exprime pour la première fois dans l’Obs. Elle raconte qu’avant son agression, elle avait été suivie et écoutée. Elle avait retrouvé des messages de menace dans la chambre de sa fille. Et cette femme se demande aujourd’hui pourquoi l’enquête judiciaire n’a jamais abouti… 

Que permettrait une enquête parlementaire?

Alors est-ce qu'une enquête parlementaire permettrait d'en savoir plus? Sans doute les députés pourraient interroger les enquêteurs de l’époque et demander pourquoi certaines pistes n’ont pas été creusées.

D'abord la piste d'intermédiaires intéressés par la signature des deux gros contrats dont il est question. Le cadre de Veolia a ainsi raconté aux policiers qu’un de ces intermédiaires l'avait menacé de viol, juste avant que ce soit finalement son épouse qui soit violée.

Tout cela ressemble à des "barbouzeries" dignes d’un mauvais roman d'espionnage. Cela fait l’objet aujourd’hui d’un film donc, en attendant peut-être de nouvelles investigations.

Nicolas Poincaré