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"C'est la France qui ferme sa gueule": la colère de Mourad Boudjellal face aux galères des petits patrons

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Alors qu'un petit patron sur deux touche moins que le Smic comme le révèle RMC, l'entrepreneur des Grandes Gueules Mourad Boudjellal dénonce "l'enfer" des charges et des impôts qiui pèsent sur les petites entreprises françaises.

Près de la moitié des petits patrons se paient moins que le Smic selon une étude du Syndicats des indépendants que révèle RMC ce jeudi 9 octobre. La plupart des chefs des TPE, les très petites entreprises françaises de moins de 10 salariés touchent moins de 1.801,80 euros bruts par mois.

La raison? Le poids des charges patronales, des impôts et des taxes notamment, alors qu'ils travaillent parfois plus de 50h par semaine. C'est le cas de Patrice, propriétaire avec son épouse d'une boulangerie-pâtisserie dans le Loir-et-Cher: "A deux, on touche 1.400 euros, 700 chacun, pour à peu près 70-80 heures par semaines", raconte-t-il sur RMC. "On a trop de charges, on a une nouvelle taxe sur les emballages, on a besoin de trésorerie de secours, tout ça c'est un ras-le-bol".

Une situation qui n'étonne plus Mourad Boudjellal, l'éditeur de bandes-dessinées des Grandes Gueules qui possède plusieurs sociétés: "La France, c'est l'enfer de l'entrepreneuriat. Les petits patrons sont les plus mal lotis, ce n'est pas nouveau. Ils n'ont pas de congés payés parce que si tu ne travailles pas il, n'y a pas de rentrée d'argent, ils n'ont pas le droit aux arrêts maladie et ils ont des retraites minables!".

"Les entrepreneurs passent du temps pour gérer les problèmes de trésorerie au quotidien ne serait-ce que pour se faire payer. La vie des entrepreneurs est bouffée par l'incertitude".

"J'ai passé ma vie à compter alors qu'on nous voit comme des grands bourgeois"

"Je n'ai aucun jour de congé, aucun arrêt maladie, j'ai passé ma vie à compter alors que les gens nous voient comme des grands bourgeois", poursuit Mourad Boudjellal sur RMC Story. Et le secteur, souvent pointé du doigt pour le travail dissimulé ou la déclaration des revenus, est très surveillé: "Les entrepreneurs sont très contrôlés, j'ai moi même été contrôlé 25 fois, sur chacune de mes sociétés. Parfois, on se demande pourquoi on fait tout ça".

Résultat, les propositions d'optimisation fiscale à l'étranger pullulent assure Mourad Boudjellal: "Pleins de boîtes proposent des délocalisations à Miami, à l'Île Maurice pour monter sa boîte sur un autre siège social. La France c'est un enfer pour l' entrepreneuriat alors que l'entrepreneur emprunte de l'argent pour créer des emplois, pour que l'Etat n'en n'ait pas la charge. On a l'impression qu'on a criminalisé cette profession".

1 petit patron sur 2 se verse moins d'un Smic - 09/10
1 petit patron sur 2 se verse moins d'un Smic - 09/10
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Même son de cloche pour Flora Ghebali, elle aussi entrepreneur: "Quand je gagne quelque chose, j'enlève directement 3/4, je considère immédiatement que je ne gagne qu'un quart de l'argent que je reçois", assure-t-elle. "On est traité dans l'ancien régime du travail, il y a eu une révolution du salariat mais nous on a des salaires très chargés et on doit prendre tous les risques".

"On n'a pas adapté aux entrepreneurs et par exemple, on ne peut pas emprunter à la banque parce qu'on n'est pas salarié. Vous prenez les risques, vous n'avez aucun avantage", ajoute Flora Ghebali.

Les petits patrons "La France qui ferme sa gueule"

"Le sujet, c'est le poids de la fiscalité", déplore l'avocat Charles Consigny. "C'est un système qui n'est pas tenable une seconde. Et l'Urssaf sert à payer les retraites, la sécurité sociale et le chômage. Il faut donc réformer tout ça", juge-t-il. "Et dès qu'on veut mettre un peu de rationalité là-dedans, on est un nazi. Ceux qui ne veulent pas qu'on touche à l'âge de départ en retraite versent des larmes de crocodiles sur la situation de ces entrepreneurs et indépendants qui subissent le poids de notre absence de réforme".

"Il faut reporter l'âge de départ en retraite, augmenter le temps de travail à 40h, rationnaliser les dépenses de santé en réformant l'assurance-chômage où il y a des abus. Vous baisserez le fardeau qui pèse sur les entrepreneurs", ajoute l'avocat.

"Ils travaillent 80h et ne se révoltent pas, c'est la France qui ferme sa gueule", conclut Mourad Boudjellal.

Reste que l'entrepreneuriat continue de susciter les vocations. Parmi les 5 millions des 18-30 ans impliqués de près ou de loin dans l'entrepreneuriat, 49% se déclarent porteurs d'un projet de création de société selon l'Indice entrepreneurial français, publié par BpiFrance en 2024.

Guillaume Dussourt Journaliste BFMTV-RMC