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Terrorisme: pourquoi la rétention de sûreté automatique est difficile à mettre en place

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Une écrasante majorité de Français se dit favorable à la mise en place de mesures de rétention de sûreté automatique pour les condamnés à des faits de terrorisme. Mais cette automaticité est légalement quasi impossible à mettre en place.

Les Français sont inquiets face à la menace terroriste. Selon un sondage Elabe pour BFMTV, ils sont 81% à se dire inquiets. Et pour leur sécurité, ils sont 84% à se dire pour une rétention automatique de sûreté pour tous les condamnés pour terrorisme, comme Armand Rajabpour-Miyandoab, l'auteur de l'attaque au couteau du 2 décembre dernier à Paris.

Instaurée en 2008 par la garde des Sceaux Rachida Dati, sous la présidence de Nicolas Sarkozy, la rétention de sûreté permet le maintien en détention d'un détenu arrivé en fin de peine. Elle concerne des personnes condamnées à au moins 15 ans de prison pour des faits de viol, meurtre, assassinat, torture, enlèvement ou séquestration, et qui présenteraient un caractère de dangerosité ou un trouble grave de la personnalité.

Les mesures de rétention de sûreté permettent le placement de force dans un centre de soin fermé pour une durée maximale d'un an renouvelable une fois, assurant une prise en charge médicale, sociale et psychologique. A l'issue des deux ans théoriques, la personne peut être relâchée donc, mais également être sujet à une liberté de sûreté avec un suivi renforcé de sa personne.

"La prison, c'est le parent pauvre de la justice"

Problème, il faut identifier les comportements à risque en détention et c'est presque mission impossible: "Si vous demandez à un surveillant d'observer le comportement de ces gens-là et de l'évaluer, il en est incapable", déplore Julien, surveillant pénitentiaire, dans Estelle Midi sur RMC et RMC Story.

"Il faut donner les moyens aux surveillants et aussi aux conseillers d'insertion et de probation, qui ont des piles de dossier sur leurs bureaux et qui ne peuvent pas gérer. Et sur les moyens donnés à la justice après avoir été promis par les ministres de la Justice, il y en a 10% alloués aux services pénitentiaires. La prison, c'est le parent pauvre de la justice", déplore ce gardien de prison.
84% des Français favorables à la rétention du sûreté : d'accord ? - 07/12
84% des Français favorables à la rétention du sûreté : d'accord ? - 07/12
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Contraintes légales

Mais avant de permettre la rétention de sûreté obligatoire, il y a le problème de la légalité. "Il y a des contraintes un peu compliquées comme la Cour européenne des droits de l'homme ou le Conseil constitutionnel", rappelle Benjamin Morel, Maître de conférence à l'université de Paris 2 Panthéon Assas.

"Je ne pense pas non plus que ce soit la priorité, alors qu'on n'a pas de places de prison. Auparavant, on a des gens en prison qui devraient être hospitalisés plus qu'emprisonnés. Depuis des années, on met des palliatifs, on alourdit les peines mais on ne les fait pas mieux exécuter", poursuit-il sur le plateau d'Estelle Midi.

"Plus qu'une énième loi, il me semble qu'il faut plus de moyens pour la pénitentiaire, plus de places de prison, un meilleur suivi psychiatrique en amont et en aval, c'est vraiment la priorité", ajoute Benjamin Morel.

G.D.