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Retour des chasses traditionnelles d'oiseaux: les associations dénoncent "l'indécence de l’Etat"

Malgré l'avis contraire de l'Europe, l'Etat envisage d'autoriser à nouveau certaines pratiques de chasse des oiseaux. Un scandale pour les défenseurs des animaux, qui alertent sur la disparition de certaines populations.

Le gouvernement veut réinstaurer les chasses traditionnelles. L'exécutif a mis en consultation mercredi plusieurs projets d'arrêtés sur les chasses traditionnelles des oiseaux, malgré un avis contraire du Conseil d'Etat et au risque de contrevenir au droit européen.

Vanneaux huppés et pluviers dorés pourraient de nouveau être chassés au filet, tout comme l'alouette des champs, qui pourrait être la cible de la chasse à l'aide de cages. 100.000 oiseaux sont en danger, dont certains comme le vanneau huppé et l'alouette des champs qui sont menacés d'extinction.

"Un préjudice écologique et un contresens de l'histoire"

"C'est un retour en arrière pour la défense des animaux et l'écologie", se désole Pierre Rigaux, naturaliste et militant écologiste. "100.000 oiseaux qui risquent d'être abattus pour rien, c'est un préjudice écologique et un contresens de l'histoire alors qu'on est dans une phase d'effondrement massif de la biodiversité", alerte-t-il.

Je ne sais pas si certains pensaient que le deuxième mandat d'Emmanuel Macron serait écologique. Preuve en est que non", ajoute Pierre Rigaux.

"Les chasseurs font attention à la planète"

Du côté des chasseurs, a contrario, on se réjouit de l'annonce. "Je ne vois pas en quoi ce serait une victoire pour l'écologie d'interdire ces chasses traditionnelles qui sont encadrées, réglementées et inscrites dans notre patrimoine", estime Nicolas Rivet, le directeur général de la Fédération nationale des chasseurs.

"Les chasseurs font attention à la planète et sont des écologistes. Ce sont des gens qui connaissent les espèces et les espaces et y travaillent tous les jours, on l'a bien vu avec les feux de Gironde", ajoute le chasseur.

L'Europe pourtant opposée à ce type de pratiques

Une directive européenne de 2009 interdit pourtant les techniques de capture massive d'oiseaux. Mais elle permet une dérogation "dès lors qu'il n'existe pas d'autre solution satisfaisante pour capturer certains oiseaux".

"L'Europe est légitimement opposée à ce type de pratiques qui ne sont souvent pas sélectives", explique ce vendredi sur RMC Allain Bougrain-Dubourg, le président de la Ligue de protection des oiseaux (LPO). "L'Europe dit qu'on peut les chasser, mais pas les capturer avec de tels pièges, si on n'a pas d'autres solutions. Or, on peut les chasser au fusil", ajoute-t-il.

"Indécence scandaleuse"

Une position que le ministère réfute, assurant qu'il n'existe pas "d'autre solution satisfaisante" et promettant le renforcement de mesures de contrôles et de surveillance. Pourtant, Allain Bougrain-Dubourg se demande comment les 1.700 agents de l'Office français de la biodiversité, en nombre insuffisant, pourront surveiller les chasseurs.

"La première mesure écologique du gouvernement, c'est de revenir sur ces chasses. On flirte avec l'indécence scandaleuse au moment où la faune est à l'agonie à cause du réchauffement climatique, des pesticides et de la disparition des haies. Et on en rajoute avec des piégeages pour faire plaisir à quelques-uns. On tord le droit pour essayer de le faire entrer dans les obligations européennes", peste Allain Bougrain-Dubourg, très remonté.

En octobre 2021, le juge des référés du Conseil d'État, saisi par les défenseurs de la nature, avait suspendu les arrêtés gouvernementaux autorisant des chasses d'oiseaux traditionnelles. Mais comme depuis son premier quinquennat, Emmanuel Macron semble très attaché à flatter les chasseurs, avec plusieurs décisions en leur faveur.

Guillaume Dussourt