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Caroline Montois, née sous X: "Je voulais trouver mes origines depuis mes 11 ans"

Caroline Montois, auteure de "Hannah née sous X".

Caroline Montois, auteure de "Hannah née sous X". - Caroline Montois / Salvator

Caroline Montois est née sous X en mars 1970. Pendant près de 30 ans, elle a cherché à retrouver ses origines. Un long parcours qui lui a permis de rencontrer huit frères et soeurs, du côté de sa mère comme de son père. Elle raconte son parcours à RMC.fr.

Caroline Montois, auteure de "Hannah née sous X", co-écrit avec Jean-Luc Douchet, est née d'une mère anonyme et a passé près de 30 ans à renouer contact avec ses origines.

"J'ai entamé des recherches en 1988, à la majorité. J'ai à ce moment là eu beaucoup de portes qui se sont fermées, ainsi qu'un refus plus ou moins catégorique du Conseil général. A l'époque, il y avait moins de facilité que maintenant pour faire des recherches et avoir des éléments pour aller plus loin.

C’était encore un peu l’ancienne manière de voir les choses, on disait d’ailleurs aux parents adoptants qu’il n’y aurait pas moyen pour l’enfant de retrouver ses origines plus tard.

J'ai ré-entamé des recherches une fois mariée, enceinte de mon premier enfant. C'est d'ailleurs ce qui m’a donné l’envie et l’élan d’en savoir plus. C'était en 1998, j’avais 27 ans. J’ai fait un courrier au Conseil général du Nord, mon département de naissance, faisant la demande d'accéder à mon dossier.

C'est à ce moment que j'ai découvert que ma mère de naissance s’appelait Simone, qu’elle avait fait un séjour à la maison maternelle de Lambersart (Nord), où l'on accueille encore les "filles-mère", et qu’elle avait eu un premier enfant avant moi.

Je ne savais pas si c’était un garçon ou une fille, je savais juste que je n'étais pas toute seule et qu’elle avait été abandonnée par son ami, mon père, reparti en Israël. J’ai donc su aussi à ce moment-là que j’avais des origines israéliennes.

"Parfois, les éléments sont un peu brodés"

Même si j’avais peu d’éléments, je me doutais qu’ils étaient plus ou moins vrais, car parfois c’est un petit peu brodé. Cela peut arriver qu'on ait un peu brouillé les pistes: il y avait marqué dans mon dossier que ma mère de naissance était "grande et blonde", alors qu'elle était toute petite et châtain. Les mères accouchent dans l’anonymat, donc on ne leur demande même pas une pièce d’identité.

Je me suis ensuite rendue à la maison maternelle de Lambersart pour essayer de voir avec les archives si 'Simone' n'avait pas eu des rendez-vous de santé, des choses qui permettraient d’avoir des traces d’elle. La psychologue de la maison maternelle m'a proposé d'aller aux archives départementales de Lille. 

J'ai communiqué les références données par celles-ci au Conseil national d'accès aux origines personnelles (Cnaop), en charge de faire les recherches depuis une loi de 2001, qui avait déjà abandonné une fois. Avec les numéros des boîtes d'archives, ils ont fini par trouver. 

La première personne que j’ai rencontré est Simone, ma mère de naissance, en octobre 2004. Le jour-même de notre rencontre, elle m'a donné l’identité de mon père, de mon frère aîné et de ma petite soeur. Mon mari a ensuite retrouvé sur Internet mon père, qui habite à New York et était alors prof d’université en ébénisterie et marqueterie. 

"Le plus difficile a été l'attente"

Le plus difficile a été d'être en attente. Je suis quelqu’un d’hyper impatient, là j’ai dû exercer ma patience. J’avais vraiment ce désir de trouver à tout prix: je portais ça en moi depuis mes 11 ans, cette certitude que ça allait aboutir. Pour moi, ça ne pouvait pas être autrement.

Je n'ai jamais eu peur de découvrir des choses qui me blesseraient. Je voulais juste trouver, j’étais prête à tout accepter, même un refus. Je pense que quand on est dans cette démarche-là, il faut être prêt à essuyer un refus. On ne sait pas qui on aura devant nous. J’ai fait ces recherches en laissant chacun en pleine liberté de refuser et de ne pas souhaiter ni savoir qui je suis, ni me rencontrer. Je n'ai jamais fait pression, en faisant appel à un tiers à chaque fois.

Ce que je voudrais voir amélioré, c'est préciser aux mères de l’ombre qu’elles peuvent adresser un courrier dans le dossier de leur enfant, même plusieurs années après. Elles peuvent toujours y mettre leur identité, un petit message, les raisons de l’abandon... Les personnes en recherche ne savent pas toujours non plus qu’il faut passer par le conseil général, et tout le monde ne connaît pas non plus le Cnaop.

Avec ce livre, je veux donner l’espoir à d’autres, dire qu'il faut persévérer. Il ne s'adresse d'ailleurs pas qu'aux nés sous X: quand on a des rêves, il faut aller jusqu’au bout, il faut de l’espoir, il faut y croire.

J’ai été élevée comme enfant unique, donc le fait d’avoir huit frères et soeurs comme ça c’est extraordinaire pour moi. Ce qui est aussi extraordinaire, c’est qu’on tisse des liens, on s’apprécie toujours plus et il y a de l’amour qui est là. Ce n'est pas uniquement la curiosité de se rencontrer et puis plus rien après, ce qui arrive malheureusement parfois."

Propos recueillis par Liv Audigane