"Il aurait fallu qu'on mente?": leur père est mort malgré trois appels au 15, deux soeurs témoignent

La colère de deux sœurs, Aurélie et Stéphanie, après le décès le 6 juin dernier de leur papa Jean-François, d’un infarctus, malgré plusieurs appels au 15. Les secours n’ont été envoyés qu’au troisième appel de leur oncle et de leur mère, présents à ce moment-là. Soit deux heures après le premier coup de fil au 15.
Au téléphone, on leur a répondu qu’il n’y avait qu’une ambulance sur le secteur et que les symptômes ne justifiaient pas qu’elle se déplace. Aujourd’hui, Aurélie et Stéphanie Paternotte témoignent sur RMC pour, disent-elles, “mettre en lumière l’état catastrophique du système de santé français et que cela ne se reproduise plus”.
Ce jour-là, après une journée alité dans son appartement du Cap d'Agde, l’état de Jean-François se dégrade. Un appel au 15, puis un deuxième, une heure plus tard. Sa fille Aurélie raconte.
“Ils ont pris nos appels à la légère, en fait. Ils ont encore répété qu’ils n’avaient qu’une ambulance pour le secteur. Son état s’était quand même détérioré. Il ne pouvait plus se lever, il transpirait énormément et puis à la fin, il ne pouvait plus parler”, se souvient-elle.
Selon les filles de Jean-François, lors des deux premiers contacts avec le SAMU, il est demandé par un médecin régulateur "d’emmener le patient par leurs propres moyens aux urgences de Béziers, à 28 km". "Mais il est déjà dans un état de faiblesse dans un état assez préoccupant, confie Stéphanie dans "Apolline Matin" sur RMC et RMC Story. Ma maman explique bien au premier appel qu’il a une douleur dans le dos, une transpiration excessive, et un état de faiblesse extrême. Il lui dit que c’est sûrement une hypoglycémie, une chose qu’il a tendance à faire mais ma maman a l’habitude et elle sait réagir face à cela."
"En voyant que son état ne s’améliore pas, elle rappelle le 15, poursuit Stéphanie. Un médecin régulateur redemande d’emmener mon papa aux urgences de Béziers, et leur dit qu’il n’y a toujours pas d’ambulance disponible, qu’il n’y en a qu’une seule sur tout le secteur."
"Il y a eu une faute"
Alors que les symptômes s'aggravent ("des problèmes d’élocution, des difficultés à respirer"), sa mère et son oncle, présents ce soir-là, décident alors d’appeler les pompiers et à nouveau le 15, retrace Stéphanie. “Deux heures s’étaient écoulées entre le premier appel et le troisième appel. Et là, mon oncle s’est énervé et lui a dit,’ est-ce qu’il faut que le patient soit dans une mare de sang pour bouger?’ Et la personne au téléphone lui a répondu: ‘C’est un peu ça’”, dénonce-t-elle.
Finalement, les pompiers et le SAMU finissent par venir, mais trop tard. "Mon papa est décédé 5-10 minutes avant l’arrivée (des secours), explique Stéphanie. S’il n’y avait pas eu toute cette attente, je ne serais peut-être pas en train de vous parler en ce moment. Quand ils sont arrivés, 15 minutes après le troisième appel, voire quatrième si on compte celui au pompier, il y a eu un massage cardiaque, mais il venait déjà de partir, de faire un arrêt cardiaque. Ils ont essayé de le réanimer mais il était trop tard."
“Il y a de la colère, de l’incompréhension. Qu’est-ce qu’il aurait fallu qu’on dise? Il aurait fallu qu’on mente pour faire venir quelqu’un? Surtout ce qu’on aimerait, c’est que ce soit reconnu qu’il y a eu une faute et peut-être que ça fera bouger les choses”, espère Stéphanie.
En charge du 15, le CHU de Montpellier a indiqué début juillet à la famille, avoir lancé une enquête interne. Mais depuis aucune réponse n’a été apportée. "Pour l’instant, on n’envisage pas de porter plainte, indique Stéphanie sur RMC. Porter plainte contre qui? Contre un système de santé qui se dégrade, et avec lui l’accès aux soins? Contre des politiques de santé qui sont complètement à revoir parce que le sytème est à bout de souffle? Les professionnels de santé se mobilisent depuis longtemps et dénoncent leurs conditions de travail, leur manque de moyens, qui entraine obligatoirement la mise en danger des malades."