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Catastrophe de Brétigny: les usagers réclament "une commission d'enquête parlementaire"

Le train déraillé à Brétigny, le 13 juillet 2013.

Le train déraillé à Brétigny, le 13 juillet 2013. - Kenzo Tribouillard - AFP

Des écoutes téléphoniques dévoilées par Mediapart laissent apparaître que la SNCF aurait délibérément laissé 350 trains rouler sur des "aiguillages pourris" et "non conformes" pendant au moins un an après le déraillement d'un train en gare de Brétigny, qui avait coûté la vie de sept personnes en 2013.

Tout a-t-il été fait pour assurer la sécurité des passagers de la SNCF après la catastrophe de Brétigny? Selon des extraits d'écoutes téléphoniques versées au dossier d'instruction publiés par Mediapart, la SNCF aurait délibérément laissé courir des problèmes de maintenance et d'infrastructures plus d'un an - et sans doute au-delà - après l'accident qui a causé la mort de sept personnes.

"Malgré le choc provoqué par l’accident, la SNCF a, en connaissance de cause, laissé 350 trains par jour rouler sur des aiguillages pourris et non conformes, écrit le pure-player. À tel point que les passagers semblent avoir eu bien de la chance d’avoir échappé à une nouvelle catastrophe.

"Multiplication des quasi-accidents"

Les écoutes téléphoniques révèlent que les aiguillages de la gare de Brétigny sont restés dans un état déplorable bien après le tragique déraillement de juillet 2013. Plus d'un an plus tard, le responsable SNCF de la zone sud-ouest de l'Ile-de-France parle encore d'un "grand n'importe quoi", d'une "multiplication des quasi-accidents".

Pourquoi la direction n'a-t-elle pas agi plus tôt, notamment en réduisant la vitesse des trains, mesure qui ne sera prise qu'en juillet 2014 pour l'ensemble des installations de Brétigny?

"Des risques ont été pris"

C'est simple, selon Mediapart: limiter la vitesse immédiatement après l'accident aurait été un aveu de culpabilité, une preuve que la décision aurait pu être prise plus tôt, avant le drame. La SNCF aurait donc préféré prendre un risque sécuritaire plutôt que judiciaire. Yann Philippin est l'auteur de l'article paru dans Mediapart. Il détaille le contenu des écoutes qu'il s'est procuré:

"En octobre 2014, on a un chef de secteur de la SNCF qui s'inquiète de la multiplication des quasi-accidents", explique-t-il ce mercredi sur RMC. "C'est-à-dire que dans le domaine des transports, c'est un incident [qui se produit de telle manière] qu'il aurait pu générer un accident. Donc, ça veut dire que, en tout cas d'après ce que disent les cadres de la SNCF au téléphone, il semble bien que des risques ont été pris en matière de sécurité à Brétigny, pour tous les usagers qui empruntent cette ligne, et ce, pendant plus d'un an après l'accident et malgré les sept morts".

"Sommes-nous en sécurité?"

Jean-Claude Delarue est le président de l’association "SOS usagers", une association d’usagers des transports. Il connaît bien cette ligne. Cette fois, c'en est trop. Il demande la création d'une enquête parlementaire.

"C'est effectivement très inquiétant" a-t-il vitupéré. "Non seulement il y a eu des carences qui ont mené à la catastrophe, mais en plus, on n'en aurait pas tiré les conséquences. Alors maintenant, je demande officiellement qu'une commission parlementaire d'enquête soit constituée immédiatement, et qu'elle interroge tous les dirigeants de la SNCF, pour savoir si nous sommes en sécurité avec ces personnes à la tête de cette société nationale des chemins de fer français, ou pas".

Contactée par Mediapart, la SNCF a regretté que "cette information judiciaire connaisse ces développements dans les médias", au risque d'aboutir à une présentation simpliste et réductrice des évènements.

C. P. avec Rémy Barret