Ce que l’élection de François Hollande va changer pour l’Europe

Que va changer l’élection de François Hollande pour l’Europe ? - -
Angela Merkel l’a répété hier lundi: le pacte budgétaire n’est pas négociable. La chancelière allemande, bien que prête à accueillir François Hollande « les bras ouverts » a réaffirmé qu’il n’y aurait pas de politique de croissance par le déficit en Europe. Ce mardi, dans un message à François Hollande, elle a estimé que la France et l'Allemagne devaient prendre « les décisions nécessaires » pour assurer l'avenir de l'Europe. En Italie, en Espagne ou à Bruxelles, des voix s'élèvent pour appuyer le nouveau président élu. Les appels à relancer la croissance en Europe se sont multipliés dimanche, sitôt connue l'élection de François Hollande en France.
« Un changement complet des rapports de force en Europe »
L'ex-candidat socialiste a déjà réussi à faire bouger les lignes dans une Union européenne focalisée jusqu'ici sur la rigueur, comme l’explique Marc Lazar, spécialiste à Sciences Po des relations franco-italiennes : « Le fait que la France soit passée du côté de François Hollande, c’est un changement complet des rapports de force en Europe. Quand Mario Monti [chef du gouvernement italien] ou Mariano Rajoy [chef du gouvernement espagnol] faisaient un certain nombre de propositions à l’égard d'Angela Merkel, ils étaient peu entendus. Le fait que la France bascule pour le moment dans le camp de ceux qui réclament des mesures pour la croissance, a fait que la chancelière a proposé immédiatement de rencontrer François Hollande. » Professeur à Paris VIII et conseiller de François Hollande sur l'Allemagne contemporaine, Jacques-Pierre Gougeon ajoute : « L’élection a fait bouger des lignes qui existaient mais n’osaient pas s’affirmer. Il y a des revendications qui sont en train de se structurer, par exemple en Italie, en Autriche ou au Danemark. »
« Merkel va devoir avancer sur la croissance »
Face à ces revendications, difficile pour Angela Merkel de rester sur sa position. D'autant plus qu'elle doit également faire face à des revendications internes : « Quand on regarde le débat qui a lieu au sein de la CDU allemande [le parti conservateur d’Angela Merkel], on voit bien que certains dans son propre camp considèrent que la notion de croissance a été trop absente du débat, explique Jacques-Pierre Gougeon. Et Mme Merkel a besoin, pour que le pacte soit adopté par le parlement fédéral allemand, des deux tiers des voix. Donc ça veut dire qu’elle a besoin des voix du parti social-démocrate. Et le parti social-démocrate aussi réclame un ajout de croissance. Eux disent qu’en l’état, ils ne votent pas le texte. Donc Angela Merkel va être obligée d’avancer sur la croissance. »
« Mario Monti était bloqué par Sarkozy et Merkel »
De son côté, le chef du gouvernement italien Mario Monti a émis le désir de « collaborer étroitement avec la France, en particulier dans le cadre européen », dans un message de félicitations adressé dimanche soir par téléphone à François Hollande. Cette collaboration doit avoir pour « objectif une union toujours plus efficace et orientée vers la croissance », a indiqué Mario Monti. Une nouvelle alliance serait-elle en train de se dessiner entre la France et l’Italie ? Pour Marc Lazar, la réponse est claire : « Oui, incontestablement. Du côté de l’Italie, on est prêt à tendre la main à Paris, si Paris veut bien la prendre. C’est assez paradoxal parce que le gouvernement de Mario Monti est supposé être un gouvernement technique, loin du socialisme à la française, et pourtant il considère qu’il y a une convergence objective. Mario Monti était bloqué par l’axe Paris-Berlin, par Sarkozy et Merkel. Donc de ce point de vue, lui qui n’est en rien socialiste, soutient la tentative de desserrement des contraintes que propose François Hollande, ou plus exactement le respect de la rigueur budgétaire d’un côté, et de l’autre une tentative de croissance. »
Un sommet européen fin juin pourrait marquer le lancement d'une stratégie européenne de soutien à la croissance.