Chasse aux arrêts maladie: "Cela se fera au détriment du patient", regrette un médecin

- - AFP
Sus aux arrêts maladie ! La Caisse Nationale d'Assurance Maladie (CNAM) présente ce jeudi matin ses propositions pour réaliser trois milliards d'euros d'économie en trois ans. Au menu : plus de prévention, plus de génériques et une prescription plus adaptée. Un meilleur respect des recommandations sur les prescriptions de médicaments antidiabétiques permettrait par exemple d’économiser 336 millions d’euros.
Autres propositions : une réduction des séjours en maternité et à l'hôpital, et une réduction des frais de transports, qui ont explosé ces dernières années en raison d'un recours accru aux taxis, notamment.
"Les généralistes ne prescrivent pas des arrêts par plaisir"
Mais l'Assurance maladie veut également enrayer l'augmentation des arrêts de travail. Elle ambitionne de réaliser 300 millions d'euros d'économies en réduisant la prescription des arrêts maladie et leur durée. Mais pour Jacques Battistoni, du syndicat des médecins généralistes MG France, "les généralistes ne prescrivent pas des arrêts maladie par plaisir ou pour faire plaisir à leurs patients, mais parce que leurs patient en ont besoin. Donc quand on les enjoints de baisser leurs prescriptions c'est compliqué pour eux". Il interroge : "Que faire face à cette patiente qui a un cancer du sein ? Face à ce malade qui a un cancer de l'estomac, qui est en arrêt maladie et qu'on ne peut pas remettre au travail comme ça ? Des cas qui échappent à une espèce de normalisation de la durée de l'arrêt de travail comme le souhaiterait l'Assurance maladie".
"On ne peut pas raisonner la médecine et la quantifier"
L'Assurance maladie alerte régulièrement des médecins jugés trop prolixes pour leur demander de réduire leurs prescriptions d'arrêts maladies. RMC a rencontré un généraliste, qui préfère rester anonyme, et qui a reçu un avertissement de la part de l'Assurance maladie en novembre dernier. "Du coup j'en ai informé mes patients. Je leur ai dit qu'il fallait que je fasse attention sur les prochaines semaines, et que pour les arrêts de longue durée, je ne pourrais pas trop leur être utile. Je leur ai conseillé d'aller consulter ailleurs". "Quand on travaille dans une zone constituée surtout d'ouvriers qui sont soumis à des travaux physiques, tout le monde craque à son travail", soutient ce généraliste installé à Grigny, dans la grande banlieue lyonnaise.
Ce médecin regrette que l'Assurance maladie ait une vision comptable de sa médecine: "Je ne peux pas vous dire si j'aurais droit à cent arrêts de travail. On ne peut pas raisonner la médecine et la quantifier. Si on doit y venir on y viendra, mais cela se fera au détriment du patient".
Les propositions de l'Assurance maladie dans les mains, le gouvernement décidera en septembre des mesures retenues dans son futur projet de loi pour le budget de la Sécu.