"Il y a les grands principes et la réalité": pourquoi la centrale à charbon de Saint-Avold redémarre
Un air de douce revanche plane à la centrale à charbon de Saint-Avold, en Moselle. Après avoir été fermée par le gouvernement en mars dernier, elle a dû redémarrer pour faire face aux difficultés d'approvisionnement d'électricité en France, pour cet hiver. À la suite de la guerre en Ukraine et des problèmes sur le parc nucléaire français, il n'y a pas eu d'autres choix pour les autorités.
"Nous le vivons comme un signe d’avoir eu raison lorsque nous disions qu’il était prématuré de fermer cette centrale au mois de mars. Or, cette question a été évacuée trop hâtivement, d’autant plus que nous avions les premiers échos qu’il y avait des fortes probabilités de devoir redémarrer pour cet hiver", affirme Jean-Pierre Damm, délégué syndical FO.
Pour Thierry Bros, professeur à Sciences Po et spécialiste des questions énergétiques, "cela prouve l'échec de dix ans de gribouilles énergétiques au niveau du gouvernement". "Il y a les grands principes et la réalité", lâche-t-il.
La quasi totalité des salariés de retour
Pour faire fonctionner cette centrale, les 70 salariés licenciés ont été rappelés par la direction au début de l'été. D'importantes primes ont été proposées et la quasi-totalité est revenue.
Pour autant, malgré ce redémarrage, les salariés s'inquiètent. Combien de temps cela va-t-il durer? Datant de 1948, cette centrale est très émettrice en CO2. Elle a besoin de 500.000 tonnes de charbon pour fonctionner les quatre prochains mois.
Le député Rassemblement national de Moselle, Alexandre Loubet, s'est emparé du sujet. "Ni l’industriel, ni les salariés qui ont été méprisés n’ont de visibilité sur le nombre de saisons d’exploitation de cette centrale à charbon", déplore-t-il. Il a décidé d'interpeller le gouvernement.
600.000 foyers alimentés
"En réalité, je pense que le gouvernement n’a pas le courage d’assumer qu’au regard de l’abandon du parc nucléaire français dont il est responsable, on va devoir faire tourner la centrale à charbon de Saint-Avold une année supplémentaire au moins", poursuit le député RN.
Cette réouverture pose quand même question. "On aurait très bien pu dire 'nous avons décidé de sortir du charbon définitivement' et ne pas rouvrir et puis faire face à quelques délestages. Manifestement, ça n'est pas très populaire, alors on rouvre la centrale", explique Thierry Bros.
Il conclut: "Nous n'avons pas suffisamment de nucléaire et la sobriété énergétique heureuse n'existe pas, nous sommes face à une sobriété énergétique subie".
Cette centrale alimente environ 600.000 foyers. Cela représente un tiers des ménages de la région Grand Est. Outre celle de Saint-Avold, il ne reste plus qu'une centrale à charbon ouverte en France. Elle se situe à Cordemais, en Loire-Atlantique.