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"Le drame va arriver": l'alerte du secteur du bâtiment, 100.000 emplois menacés

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Le secteur immobilier est menacé, miné par les hausses des prix et des taux d'intérêt. Et avec lui, c'est tout le secteur de la construction qui pourrait connaître une grave crise, avec 100.000 emplois qui pourraient disparaître.

Quand le bâtiment va, tout va. Mais à l'instar de l'immobilier, il se porte très mal, et ce n'est pas un bon signe pour l'avenir de l'économie. Les constructions de logements neufs, l'une des principales branches d'activité du bâtiment, s'effondrent. Au 1er trimestre 2023, le nombre de permis de construire délivrés en France a baissé de 26,7%, par rapport à 2022. Le marasme devrait se poursuivre jusqu'en 2025.

Conséquence, près de 100.000 emplois sont menacés, assure la Fédération française du bâtiment (FFB). "Après deux ans d'alerte systématique et continue de la FFB, le ressort est cassé et 100.000 emplois sont menacés", prévient dans "Apolline Matin", ce vendredi sur RMC et RMC Story, Olivier Salleron, le président de la Fédération française du bâtiment. "Le logement neuf a plongé depuis deux ans à cause du foncier, du crédit, des terrains à bâtir. C'est un cri d'alarme, en avance. Le drame va arriver", prévient-il.

"On a gagné 120.000 employés depuis le Covid-19. On a bien travaillé, on a été résilients, agiles. Et aujourd'hui, on a des coups de ciseaux, de sécateurs, de haches, qui nous font sûrement, fin 2024, si aucune mesure n'est prise, licencier 100.000 salariés", martèle Olivier Salleron.

Matières premières et taux d'intérêt en hausse

Le secteur subit de plein fouet les hausses des prix. Celle des matériaux d'abord, mais aussi celle de l'énergie et plus généralement du prix des terrains, qui empêche tout opération immobilière, même l'achat de pavillon. En sus, les taux d'intérêts s'envolent, aux alentours aujourd'hui de 3,5%.

Pour éviter tout effondrement, Olivier Salleron appelle étendre le prêt à taux zéro et à agir sur les conditions de crédits, notamment pour les primo-accédants, souvent des jeunes ménages, qui se heurtent à des exigences trop restrictives, les empêchant d'obtenir un prêt. Il appelle à faciliter l'obtention de crédit "sans surrendetter le pays". "Il faut regarder le reste à vivre des ménages. Aujourd'hui, ils épargnent, ils ne consomment plus et ils ont perdu le réflexe de la pierre", constate Oliver Salleron.

Impossible aujourd'hui de rembourser un prêt représentant plus de 35% de ses revenus, quels qu'ils soient. Certains ménages pourtant aisés, qui pourraient conserver un reste à vivre conséquent en s'endettant au-delà de cette limite de 35% imposée par la Banque de France, se retrouvent en incapacité d'emprunter.

C'est pour demander un assouplissement de ces conditions qu'Olivier Salleron doit rencontrer ce vendredi les présidents des banques françaises.

Relancer la loi Pinel

Et pas question, pour relancer le marché, d'assouplir les normes, assure-t-il. "On sait construire durable et écologique. On sait faire, mais il faut booster la demande", explique Olivier Salleron. "Il faut aussi aider ceux qui veulent investir pour loger des locataires. C'est le fameux Pinel qui offre des avantages fiscaux mais qui n'est plus attractif. Il faut le relancer sur deux ans", estime-t-il.

Et les autorités sont déjà au courant, selon le président de la Fédération française du bâtiment. "Il y a six mois, le ministre du Logement a évoqué une bombe sociale dans le logement neuf et Bruno Le Maire a déjà rencontré les présidents des banques. Tout le monde a pris la mesure de la situation, l'audit est partagé", conclut Olivier Salleron, qui anticipe au moins deux années de crise dans le secteur.

Guillaume Dussourt