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Réforme du travail: "C'est tellement révoltant que ça doit exploser!"

Vue prise le 18 avril 2008 à Montreuil, de l'intérieur du siège de la CGT.

Vue prise le 18 avril 2008 à Montreuil, de l'intérieur du siège de la CGT. - AFP

TÉMOIGNAGES - Les principales organisations syndicales se retrouvent ce mardi pour une réflexion sur d'éventuelles actions et initiatives communes, pour organiser la riposte à la loi El Khomri. Pour prendre le pouls de la base, RMC a rencontré lundi des syndiqués, manifestement prêt à descendre dans la rue.

Ils ne s'étaient pas retrouvés autour d'une même table depuis un peu moins de trois ans. C'est la riposte des syndicats à la réforme du droit du travail. Les principales organisations syndicales se retrouvent ce mardi pour une réflexion sur d'éventuelles actions et initiatives communes.

Cette intersyndicale, à l'appel de la CGT, se tient ce mardi à 18h, à Montreuil. Toutes les organisations répondront présentes, à l'exception des cadres de la CFTC. Et c'est donc le projet de loi de Myriam El Khomri qui sera au centre des discussions. Un texte jugé trop favorable au patronat.

"Je suis outrée de tout ce que l'on retire aux travailleurs"

Le projet de loi prévoit notamment la primauté des accords d'entreprise en matière de temps de travail, la possibilité de référendum pour valider des accords minoritaires, une "sécurisation" juridique du licenciement économique pour les entreprises, des indemnités prud'homales plafonnées et un recours facilité au forfait-jour dans les petites entreprises.

Pour prendre le pouls de la base, RMC a rencontré lundi des syndiqués, manifestement prêt à descendre dans la rue. A peine entrée dans ce local CGT du Nord de Paris, c'est Eva, qui donne l'ambiance.

"Je suis absolument outrée de tout ce que l'on retire aux travailleurs", enrage-t-elle au micro de RMC. "C'est tellement révoltant que ça doit exploser!"

"Ça peut être violent"

Sous le portrait d'Henry Krasucki, qui a fait ses débuts dans cette union locale, Jean-Charles, militant de longue date, résume, à sa façon, la loi de Myriam El Khomri:

"Il faut faire la même chose, par moins de travailleurs, moins bien payés. Même les mômes, ils vont les faire bosser. C'est retour vers le XIXe siècle! Au XIXe siècle, il y avait des révolutions, au XXIe, il y en aura!"

Les militants sont unanimes: chez eux la révolte est proche, mais chez les travailleurs, parfois non syndiqués, difficile de faire des pronostics. Lofti est le secrétaire générale de l'union locale:

"Il y a un peu de peur, il y a aussi une envie de se mobiliser. Il suffit d'un déclencheur. On ne sait pas comment ça va pouvoir se produire. Ça peut être violent".

Plus de dialogue possible

Ici, plus personne ne croit au dialogue. Pour Jean-Charles, il n'y a plus de discussion possible avec le gouvernement:

"S'il y a cinq millions de grévistes, là d'accord, on peut aller discuter avec le gouvernement, parce qu'on dit: 'voilà, on est cinq millions. Soit on vous fout tout en l'air, soit vous nous donnez quelque-chose".

Les militants en sont persuadés. L'intersyndicale ce mardi ne lancera rien: les grandes mobilisations naissent d'abord de la base.

"Ça va éclater, à un moment où à un autre"

Et qu'en pense-t-elle, cette base? Dans les unions locales CGT, est-on prêt à lancer un vrai mouvement de colère? Paul, militant dans le XXe arrondissement de Paris, par exemple, en est persuadé: la colère gronde.

"J'ai le privilège d'avoir connu Mai 68", se remémore-t-il au micro de RMC. "Quand on passait sur les chaînes - je travaillais chez Renault - et qu'on disait aux ouvrier 'il faut se mobiliser', les gens répondaient, bien souvent 'un mouvement collectif, ce n'est pas possible'. Quinze jours ou trois semaines après, ils occupaient leur usine. Alors aujourd'hui, on ne peut pas savoir ce qui va la déclencher. Nous, on pense simplement que c'est souhaitable. On sera tous surpris, sans doute, le moment où ça arrivera. Les apprentis mineurs vont devoir, aussi, supporter des horaires de travail dingues. C'est aussi revenir au XIXe siècle! Ce n'est pas possible: ça va éclater, à un moment ou à un autre".

"On va discuter et essayer d'amender" le texte, promet la CFTC

Seule voix discordante au sein de cette unanimité syndicale, la Confédération française des travailleurs chrétiens, la CFTC, qui ne participera pas, ce mardi soir, à l'intersyndicale. Philippe Louis, président confédéral de la CFTC, s'explique:

"On a un projet de loi qui est amendable", assure-t-il ce mardi sur RMC. "Pour l'instant, nous on est dans une phase de travail. Nous sommes en train de décortiquer ce projet de loi".

Une envie de discuter qui ne signifie pas non plus donner un blanc-seing au gouvernement. Pour Philippe Louis, ce texte, en l'état, est loin d'être satisfaisant: 

"Je pense qu'il est déséquilibré: il faut sécuriser un petit peu plus les salariés, et la porte n'est pas fermée. Donc on va discuter et on va essayer de l'amender avant qu'il passe en conseil des ministres le 9 mars".

Lancée jeudi, la pétition en ligne "Loi travail: non, merci !" a récolté, ce mardi matin, près de 295.000 signatures. À cette pétition, s'est ajouté un site internet, qui décortique le texte du gouvernement.

C. P. avec Thomas Chupin