Retraites: accord "historique" à la SNCF avec les syndicats, les effets de la réforme détournés?

Ce lundi 23 avril, la direction de la SNCF a entériné un accord historique qui accompagne ses travailleurs dans la fin de leur carrière avec de nouvelles conditions avantageuses. Cet accord, signé initialement par la CGT Cheminots, CFDT Cheminots et l’UNSA Ferroviaire, compte également Sud-Rail qui a finalement annoncé son intention de signer après consultation de ses adhérents. Une unanimité rare au sein du groupe ferroviaire public.
A court terme, les usagers du train voient ainsi s'éloigner la menace d'une grève pendant les ponts du mois de mai. Mais alors que la réforme des retraites a soufflé sa première bougie le 14 avril dernier, la SNCF semble la détourner en partie. Car avec ce nouveau plan, les cheminots et contrôleurs de la SNCF vont pouvoir partir à la retraite plus tôt.
Jusqu'à 18 mois non travaillés où les salariés sont rémunérés à 75%
Le cœur de l’accord, c’est l’amélioration du dispositif de retraite anticipée, en particulier pour les cheminots ayant occupé des postes pénibles. La réforme des retraites était censée les faire travailler deux ans de plus. Mais avec ce nouvel accord, ça peut être dans certains cas seulement un an de plus, voire moins. Ce plan varie selon l'ancienneté et la pénibilité de l'emploi pour aller jusqu'à 18 mois non travaillés où les salariés sont rémunérés à 75%.
Les plus avantagés sont les contrôleurs qui pourront entamer une cessation anticipée d'activité trois ans avant leur départ en retraite, dont 18 mois rémunérés à 75% en restant chez eux. C’est le double du dispositif prévu pour les cheminots de base.
En plus, le temps partiel de fin de carrière sera rémunéré 10% de plus que le temps réellement effectué. La direction a également proposé la création d'un échelon d'ancienneté supplémentaire pour améliorer la rémunération des cheminots en fin de carrière.
Arnaud Aymé, spécialiste des transports et directeur de Sia Partners, estime que cet accord unifié est "historique". "Pour l'employeur, il y a l'assurance d'avoir des salariés qui en fin de carrière restent productifs, motivés et efficaces", juge-t-il.
"L'objectif de la CGT était d'annihiler les effets de la réforme des retraites"
C’est une revanche pour les syndicats qui avaient subi la réforme mettant fin au régime spécial en 2018 et l’allongement de la durée de cotisation en 2014. Et autant de temps gagné sur la réforme des retraites pour Dominique Fallacra, secrétaire fédéral de la CGT Cheminot en charge du pôle protection sociale.
"L'objectif de la CGT était d'annihiler les effets de la réforme des retraites", reconnaît-il.
Mais d'après Annie Jolivet, chercheuse économiste au Conservatoire national des arts et métiers, c'est un dispositif loin d'être unique et déjà présent dans de grandes entreprises, comme Michelin et Orange. "C'est ce qu'on pourrait appeler des préretraites d'entreprises. Les salariés restent dans le personnel mais dans des périodes de temps non travaillé", explique-t-elle.
Les futurs cheminots qui seront embauchés sont aussi concernés par cette cessation anticipée d'activité.