RMC

Génocide arménien: "Si aux 100 ans ils n'ont pas reconnu, ils ne reconnaîtront plus"

L'Arménie commémore ce vendredi le 100ème anniversaire du génocide perpétré par les Turcs ottomans et qui a fait 1,5 million de morts. Mais cent ans après, les autorités turques refusent de reconnaître ces massacres comme un génocide.

C'était il y a un siècle. Le 24 avril 1915 débutait la déportation des intellectuels Arméniens par l'Empire Ottoman. Durant les deux années qui suivirent, les autorités arméniennes estiment qu'1,5 million d'Arméniens ont été assassinés de manière systématique sur le territoire actuel de la Turquie. Un génocide, en tout cas reconnu officiellement comme tel par plus d'une vingtaine de pays dont la France. La Turquie, elle, récuse ce terme et préfère parler de guerre civile doublée d'une famine.

"Mon père a été laissé pour mort"

Un siècle plus tard, RMC a rencontré des enfants de rescapés. C'est le cas par exemple de Nicole Essayan, fleuriste d'une soixantaine d'année à Issy-les-Moulineaux. Ses parents sont donc des survivants du génocide, ils ont été sauvés par des paysans. "La sœur de ma mère est morte mais elle a survécu. Quant à mon père, enfant d'une famille de 14 enfants, s'est retrouvé seul après le génocide", témoigne-t-elle.

Mais à la maison, a priori, on ne parlait pas beaucoup du génocide: "Vous vous rendez compte, j'ai attendu 60 ans pour savoir que c'était un coup de sabre que mon père avait reçu sur le crane ! Il me disait qu'il était tombé dans une piscine, je pensais que c'était vrai…" Il faut dire que les parents de Nicole ont vu et vécu des horreurs: "Mon père a été laissé pour mort. Il a vu sa mère, ma grand-mère, éventrée. C'est atroce !"

"Que la Turquie reconnaisse le génocide"

Un siècle plus tard donc la Turquie a présenté ses condoléances mais refuse toujours de reconnaitre ce génocide. "Mon père me disait toujours: 'Si aux 100 ans ils n'ont pas reconnu, ils ne reconnaîtront plus'. On espérait qu'au bout de 100 ans la Turquie reconnaisse. Mais 100 ans ont passé et n'a rien changé", regrette-t-elle. Dès lors, pour elle, la diplomatie a atteint ses limites. Nicole garde toutefois espoir.

"Mon rêve c'est, qu'avant de ne plus pouvoir marcher ou comprendre, la Turquie reconnaisse ce génocide. Le jour où ça sera le cas, mon billet sera pris pour aller en Turquie. Mon rêve c'est ça. Mais je n'irai pas tant qu'ils n'auront pas reconnu", assure-t-elle la voix chargée d'émotion. En attendant, ce vendredi, Nicole manifestera à Paris. Comme chaque 24 avril depuis plus de 50 ans...

Maxime Ricard avec Pierre Rigo