Hulot franchit le pas, Villepin ménage le suspense

L'échiquier politique s'anime en France dans la perspective de l'élection présidentielle : l'écologiste Nicolas Hulot se lance dans la bataille mercredi alors que Dominique de Villepin pourrait suivre Jean-Louis Borloo sur la case convoitée du centre. /Ph - -
En ces temps de recomposition, l'initiateur du Pacte écologique de 2007 entend incarner "l'écologie populaire" à vocation sociale, au centre-gauche.
Personnalité préférée des Français, devant Dominique Strauss-Kahn et Jacques Chirac, Nicolas Hulot se déclarera mercredi matin à Sevran, une ville de Seine-Saint-Denis emblématique de la "souffrance sociale" dont l'aspirant politique veut faire son cheval de bataille.
Sevran est administrée depuis mars 2001 par Stéphane Gatignon, passé du Parti communiste à Europe Ecologie fin 2009.
Nicolas Hulot a une "certitude, c'est que nous sommes à un moment essentiel, qu'il y a des urgences absolues et que les écologistes ont des réponses", a dit à Reuters l'un de ses proches, Pascal Durand, membre fondateur d'Europe Ecologie.
Après René Dumont en 1974 ou José Bové en 2007, l'animateur de télévision, néophyte en politique, complètera la liste des personnalités de la société civile briguant le baptême des urnes. Un baptême jusqu'ici toujours synonyme de désillusion.
Nicolas Hulot, qui aura 56 ans le 30 avril, doit théoriquement franchir l'obstacle des primaires d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV) face à sa principale rivale, l'ex-magistrate Eva Joly, autre figure de la société civile.
A moins qu'il n'envisage de faire cavalier seul.
Le vote, dont le résultat devrait être connu le 24 juin ou le 9 juillet en cas de second tour, s'annonce serré. Le processus de désignation est pour l'heure ouvert aux adhérents et "coopérateurs" d'EELV, moyennant une cotisation de 20 euros, contrairement au voeu de Nicolas Hulot et ses alliés, qui plaident pour un scrutin ouvert.
VILLEPIN NE VEUT PAS "SE RENIER"
Des discussions ont débuté en vue d'élargir le corps électoral, via une baisse de la cotisation, mais des décisions ne seront arrêtées qu'après l'entrée en scène de Nicolas Hulot.
Pour Eva Joly, "il n'y a aucune raison" que les primaires "provoquent des dégâts", mais l'ex-juge ne se prive pas d'attiser les tensions en multipliant les piques.
Comme cette comparaison, lundi dans La Voix du Nord:
"Dans votre famille, aux déjeuners du dimanche, il y a l'oncle très populaire que tout le monde aime bien. Mais si vous avez des problèmes personnels ou des conseils à obtenir pour l'avenir de vos enfants, il n'est pas sûr que vous vous tourniez vers lui."
La "famille", il en est éloquemment question à droite depuis que Jean-Louis Borloo a choisi jeudi dernier de s'en séparer. L'ancien ministre de l'Ecologie, dont le bilan est fustigé par EELV, a pris ses distances avec l'UMP et s'est dit prêt à représenter le centre à l'élection présidentielle.
Depuis, il n'est pas un haut responsable de la majorité qui n'appelle au rassemblement d'une fratrie divisée de crainte que la multiplication des prétendants ne compromettent définitivement les chances de la droite en 2012.
"Quel progrès y aurait-il à se replier chacun dans sa case: la case des républicains, la case des humanistes, la case des partisans de l'autorité, la case des Européens, la case des souverainistes?", a lancé le Premier ministre François Fillon.
VILLEPIN JUSQU'AU BOUT ?
Dominique de Villepin, qui a choisi de ne pas renouveler sa carte de l'UMP pour porter sa vision du gaullisme social à la tête de République solidaire, entendra-t-il l'appel?
A l'approche du procès en appel de l'affaire Clearstream, les relations entre Nicolas Sarkozy et l'ex-Premier ministre paraissent certes en voie de normalisation, mais ce dernier refuse de "se renier" ou "s'effacer".
Dans cette pré-campagne où le non-dit s'impose comme mode de communication, l'ancien bras droit de Jacques Chirac a exprimé le désir d'"incarner" le projet politique qu'il présentera jeudi matin, deuxième temps fort de la semaine politique.
Le temps de la candidature, si tel est le scénario ultime, viendrait ultérieurement.
"Je ne pense pas que ce soit fait jeudi", mais "quand on défend des idées, on défend des valeurs, il faut aller jusqu'au bout", a dit à Reuters le député "villepiniste" Jacques Le Guen.
"On est à un an de l'élection présidentielle, on ne va pas s'affoler. Il est temps de débattre, de faire des propositions. Pas de panique", ajoute-t-il.
Selon un sondage Ifop pour le Journal du Dimanche, 19% des Français estiment que Dominique de Villepin serait le meilleur candidat pour le centre, loin derrière Jean-Louis Borloo (37%) et François Bayrou (36%).
par Sophie Louet avec Laure Bretton, édité par Yves Clarisse