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38 morts, missile russe, trajectoire étrange... Ce que l'on sait du crash de l'avion de ligne au Kazakhstan

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Les origines du crash de l'avion de ligne de la compagnie aérienne Azrbaijan Airlines, mercredi, ne sont toujours pas connues. Pour des raisons encore inconnues, l'avion a dévié de sa trajectoire initiale. Plusieurs hypothèses ont été émises, et une enquête a été ouverte. 38 personnes sont décédées.

Deux jours après le crash d'un avion de ligne de la compagnie aérienne Azerbaijan Airlines, mercredi, les informations sont de plus en plus nombreuses au sujet de cet incident, mais les causes de ce crash sont encore floues.

38 personnes décédées, et au moins 29 survivants

L'avion transportait 62 passagers et cinq membres de l'équipage. Selon le ministère kazakh des Situations d'urgence, 38 personnes ont été tuées et "29 survivants, parmi lesquels trois enfants, ont été hospitalisés".

À bord, il y avait 37 ressortissants azerbaïdjanais, six ressortissants kazakhs, trois citoyens kirghiz et 16 citoyens russes, selon le ministère kazakh des Transports.

Quatre victimes ont été rapatriés jeudi en Azerbaïdjan, selon la compagnie Azerbaijan Airlines, le retour de 14 blessés étant aussi attendu dans la journée.

L'avion s'est écrasé à 400 km de sa destination initiale

L'appareil reliait Bakou, la capitale de l'Azerbaïdjan à Grozny, celle de la république russe de Tchétchénie, où des attaques de drones ukrainiens avaient été rapportées ces dernières semaines. Mercredi, les autorités russes avaient fait part de frappes de drones dans deux régions voisines. Un vol jugé "aberrant" par Nicolas Tenzer, enseignant en géostratégie à Sciences Po, invité d'Apolline Matin ce vendredi sur RMC et RMC Story.

"On se demande pourquoi cette compagnie a pris ce risque là d'aller atterrir à Grozny, partie de la Fédération de Russie à ce moment-là", ajoute Nicolas Tenzer.

Le plus étrange reste le lieu de son crash, au Kazakhastan, situé à plus de 400 km de sa destination initiale. L'avion a d'abord suivi son trajet le long de la mer Caspienne, avant de disparaître des radars. Il est ensuite réapparu de l'autre côté de la mer, alors qu'il n'était pas censé la traverser.

Après avoir tourné autour de l'aéroport de la ville d'Aktaou, l'appareil s'est finalement écrasé très à l'est de sa destination initiale, à 433 km de Grozny. L'ancien directeur du BEA, Jean-Paul Troadec, a estimé que la trajectoire suivie par l'avion était "une grosse inconnue" de l'affaire.

L'agence de l'aviation civile russe (Rosaviatsia) avait indiqué mercredi qu'"en raison d'une situation d'urgence à bord de l'avion, son commandant avait décidé de 'se rendre' vers un autre aérodrome". Le site spécialisé Flightradar24, qui suit les vols, a indiqué que l'appareil avait subi durant son vol "d'importantes interférences GPS".

La situation était "très difficile" autour de l'aéroport de Grozny le jour du crash

L'agence russe de l'aviation, Rosaviatsia, a expliqué que la situation autour de l'aéroport de Grozny, destination initiale du vol, était "très difficile" ce jour-là.

"À ce moment-là, des drones militaires ukrainiens menaient des attaques terroristes contre des infrastructures civiles dans les villes de Grozny et Vladikavkaz", a affirmé le patron de Rosaviatsia, Dmitri Iadrov, sur Telegram.

Ce dernier a également fait état d'un "brouillard épais" qui empêchait toute visibilité "à une altitude de 500 mètres". "Le commandant de bord a fait deux tentatives d'atterrissage à Grozny, qui ont échoué. D'autres aéroports lui sont proposés. Il décide de se rendre à l'aéroport d'Aktaou", au Kazakhstan, a ajouté M. Iadrov.

La Russie potentiellement responsable ?

Les origines de ce crash ne sont pas encore connues, et le flou persiste autour de ces dernières. La compagnie aérienne Azerbaijan Airlines avait d'abord affirmé que l'avion avait percuté une nuée d'oiseaux, avant de se raviser. L'ancien expert de la BEA, Jean-Paul Troadec, a jugé cette hypothèse "peu probable", car "ça n'empêche pas l'avion de voler".

Une autre piste a ensuite été privilégié, celle d'un missile de défense aérienne russe, selon un responsable américain s'exprimant sous couvert d'anonymat. L'Azerbaïdjan pense également qu'un missile russe est à l'origine de ce crash, ont indiqué des médias azerbaïdjanais et internationaux en citant des sources anonymes au sein du gouvernement de ce pays du Caucase.

"Ça paraît aujourd'hui l'hypothèse la plus probable, mais elle n'est pas certaine. Quand on voit les impacts des missiles antimissiles sur l'appareil et d'autres faits troublants, on peut se poser des questions", estime Nicolas Tenzer sur RMC.

Jean-Paul Troadec partage cette analyse: "Les traces qu'on voit sur l'avion laissent quand même penser que c'est assez probable" qu'il ait été abattu par un missile. Opposée à la Russie dans un conflit qui dure depuis février 2014, l'Ukraine affirme de son côté que le pays dirigé par Vladimir Poutine "doit être tenu pour responsable".

L'enquête pourrait être difficile à mener

Pointée du doigt, la Russie n'a pas voulu faire de commentaires. "Une enquête est en cours. Nous estimons que nous n'avons pas le droit de faire des commentaires avant les conclusions de l'enquête", a déclaré à la presse le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov.

Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a jugé jeudi qu'il "serait inapproprié d'émettre des hypothèses avant les conclusions de l'enquête". Les autorités du Kazakhstan, proche allié de la Russie, ont aussi dénoncé des "spéculations" et ouvert une investigation.

Mais les investigations pourraient s'avérer longues et complexes. "Quels sont les pays qui vont conduire l'enquête ? Vous allez avoir le Kazakhstan, qui était dans l'ancien espace soviétique, membre de l'Organisation du traité de sécurité collective, la petite OTAN russe. Quant à l'Azerbaïdjan, qui s'est rapproché considérablement de Moscou, on peut penser qu'il fera tout pour essayer de faire taire cette enquête et qui aura des pressions de Moscou", analyse Nicolas Tenzer, enseignant en géostratégie à Sciences Po, qui craint que des pressions soient mises en place "pour faire taire cette enquête".

TRC (avec AFP)