La France rétrocède sa dernière base armée au Tchad et au Sahel et tourne une page historique

C’est plus qu’une page qui se tourne. C’est un livre qui se ferme avec la fin de la présence historique de la France au Sahel. Personnels et matériels de combat ont été transférés en France. On dit du Tchad que c’était un porte-avion militaire français dans le désert. Jusqu’à 5.000 militaires français étaient sur place au plus fort de l’opération anti-jihadiste Barkhane.
Depuis, quatre autres anciennes colonies françaises - le Niger, le Mali, la Centrafrique et le Burkina Faso - ont enjoint Paris à retirer son armée de leurs territoires, où elle était historiquement implantée, et se sont rapprochées de Moscou. Et même hors Sahel : le Sénégal et la Côte d’Ivoire ont annoncé le départ des troupes françaises cette année. Si une centaine de formateurs vont rester au Gabon, seule la base de Djibouti gardera son importance en Afrique, avec 1.500 militaires.
À quoi servaient ces bases en Afrique? Leur rôle à évolué depuis l’indépendance des différents pays francophones d'Afrique. Elles nous permettaient de sécuriser les Français sur place et de nous projeter sur différents terrains. Longtemps, ces bases ont aussi servi aussi à sécuriser les régimes africains. Ainsi, elles ont perpétué une image post-coloniale, une image "France Afrique", pas toujours la plus flatteuse pour la France.
Perte d'influence française
Mais perdre ce rôle sécuritaire, c’est aussi inciter les pays africains à se tournent vers d’autres : on pense évidemment aux mercenaires russes du groupe Wagner. La France a clairement perdu en influence en Afrique. Les Russes donc mais aussi les Emiratis, les Chinois, les Américains, les Turcs, les Indiens.
On quitte le terrain et le militaire et diplomatique pour le commerce, car l’Afrique et ses richesses ont attiré d’autres convoitises. La Chine nous a largement supplantés dans le partenariat commercial. La France dépend même un peu du continent africain: en 2023, avec 15% de l'approvisionnement français en minerais stratégiques et plus de 11 % de l'approvisionnement en hydrocarbures.
Ces fermetures de bases françaises en Afrique sont-elles un camouflet? En tous cas, on sent un peu d’aigreur côté français. Souvenez-vous des mots d’Emmanuel Macron alors qu’il présentait ses vœux aux ambassadeurs français.L’ancien ministre Jean-Marie Bockel était envoyé spécial pour l’Afrique du président Emmanuel Macron. Dans un rapport de novembre, il préconisait de réduire la présence militaire française sur le continent.
Pas la décision du gouvernement français
"Armée française, allez-vous en"!, écrivait le journal Wakat Sera au Burkina à l’automne. La réalité, c’est que l’annonce de la fermeture des bases n’est pas venue de Paris mais des gouvernants africains. En ce qui concerne le Tchad, elle est survenue sans prévenir, quelques heures seulement après la visite du ministre des Affaires étrangères Jean-Noël Barrot à Ndjamena.