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Y aura-t-il une cyber-guerre froide entre les Etats-Unis et la Russie?

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Barack Obama a mis en cause Vladimir Poutine vendredi dans les piratages informatiques survenus pendant l'élection présidentielle remportée par Donald Trump, citant un rapport de la CIA. Le président américain a même menacé la Russie de représailles. La nouvelle guerre froide aura-t-elle lieu sur le web?

Nicolas Arpagian, spécialiste en cybersécurité et auteur de l'ouvrage "La cybersécurité" (Editions Puf), ne croit pas à une cyber-guerre froide. Il estime que ces tensions entre Barack Obama et Vladimir Poutine devrait s'éteindre avec la prise de fonction du nouveau président américain Donald Trump:

"Dans ce cas précis, il s'agit davantage d'une tension entre Barack Obama et Vladimir Poutine qu'entre les Etats-Unis et la Russie. A partir du 20 janvier, quand l'administration Trump va commencer à se mettre en place, il est tout à fait vraisemblable que tout cela va s'éteindre.

Donald Trump a déjà dit qu'il ne croyait pas au rapport de la CIA. Barack Obama affirme que ça aurait joué en faveur de Donald Trump donc a priori cette action devrait s'éteindre avec l'arrivée de Donald Trump. Il n'y aura donc pas de cyber-guerre froide.

Barack Obama a une attitude assez particulière de dénigrement de la Russie, avec des arguments qu'on attend pas forcément de la première puissance mondiale en disant que la Russie est un petit pays.

Ce qui est étonnant, c'est qu'il ne s'approprie pas le rapport de la CIA. Il ne va pas jusqu'à franchir la dernière étape qui lui est accessible: publier le rapport de la CIA. En plus avec le départ d'Obama, 4.000 dirigeants de la haute administration sont sur le départ, donc il n'y a pas grand monde qui est très motivé pour partir dans une logique d'affrontement.

La seule arme en sa possession, c'est de publier le rapport de la CIA. Il faut trouver le vecteur car on n'imagine mal qu'il soit publié sur le site de la Maison Blanche. Même s'il le laisse fuiter dans la presse, ça risque d'être vain car si l'administration qui lui succède n'en fait rien, ça restera un petit épisode américano-russe.

"Pas de preuve absolue de la matérialité de l'attaque"

J'ai l'intime conviction que le rapport de la CIA fait état de faisceaux de présomption lui inclinant à penser que l'attaque pourrait être d'origine russe. C'est à mon sens la raison pour laquelle ce rapport ne sera pas publié, parce qu'il ne contient pas de preuve absolue de la matérialité de l'attaque.

On peut tenir des propos de prétoire, s'invectiver, mais lorsque qu'on envisage une mise en cause, il faut en apporter la preuve. Jusqu'à présent, dans les grandes attaques, les seuls cas où on a eu des preuves c'est quand il y a eu des défections, comme le sergent Manning ou Edward Snowden.

Est-ce que la Russie a la capacité de le faire? Oui. Est-ce que la Russie a les moyens de le faire? Oui. Est-ce que la Russie a intérêt à le faire? Oui. Est-ce que ce serait un mode opératoire envisagé par Vladimir Poutine? Oui. Mais il ne faut pas verser dans la rapide conclusion à cause d'éléments disparates qui vont dans la même direction, mais n'apportent pas la preuve formelle de la culpabilité.

"Pas de conflit moderne sans volet numérique"

C'est la différence entre l'affirmation politique et la mise en cause juridique. Si ce rapport de la CIA devait être publié et ne contenir qu'un faisceau de présomption, on entrerait dans une phase de contestation qui serait forcément longue et technique et ferait que ce débat s'enliserait dans les sables.

Il n'y a pas aujourd'hui un conflit moderne sans un volet numérique. Que ce soit en Israël qui a un arsenal de pointe dans le domaine de la guerre numérique. Que ce soit la France, la Grande Bretagne, les Etats-Unis, la Chine, c'est déjà le cas".

Propos recueillis par Paulina Benavente