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Le patron de la Fifa veut réformer le hors-jeu: "Et après, on bande les yeux du gardien?"

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Gianni Infantino, le président de la Fifa, a très envie de réformer le hors-jeu. Son idée: appliquer cette règle uniquement dans les 16 mètres. Une idée qui fait bondir Mickaël Ponchon, éducateur U13 dans un petit club alsacien.

Mickaël Ponchon, éducateur à l'Entente LMV:

"Il paraît que lundi 21 novembre, face aux lecteurs du Parisien, M. Infantino, le nouveau Big Boss de la Fifa, après que Sepp Blatter ne soit retourné rendre ses comptes en Suisse, était très décontracté, et invitait tout à chacun, frères de ballon rond, à l’appeler Gianni.

Alors, soit, Gianni, je te le dis, sur ce coup-là, tu craques un peu.

Bon, je ne reviendrai pas sur l’élargissement envisagé à 48 équipes de la phase finale de la Coupe du Monde en 2026, dont l’intérêt sportif proche du néant ne bouleversera pas l’apprentissage des fondamentaux du foot par les masses laborieuses en chaussettes courtes.

Par contre, quand tu évoques une énième réforme de la loi 11, qui jugerait les positions de hors-jeu à partir des 16 mètres, là, tel un Nico Anelka des grands soirs, tu dézones un peu.

Pour ceux qui signeraient leur première licence, on rappelle ce que dit l’IFAB (le Board, l'organisme qui gère les lois du jeu, ndr):

Être en position de hors-jeu n’est pas une infraction en soi. Un joueur est en position de hors-jeu si :

• il est plus près de la ligne de but adverse que le ballon et l’avant-dernier

adversaire.

Un joueur n’est pas en position de hors-jeu s’il se trouve:

• dans sa propre moitié de terrain, ou

• à la même hauteur que l’avant-dernier adversaire, ou

• à la même hauteur que les deux derniers adversaires.

"L’objectif est de rendre le football (télévisé) plus bankable, plus spectaculaire"

Sous couvert de simplification, on imagine bien que l’objectif est de rendre le football (télévisé) plus bankable, plus spectaculaire. Après tout, c’est vrai que quand, en 1920, le nombre minimal d’adversaire entre l’attaquant et le but est passé de 3 à 2, une hausse de 30 % des buts marqués s’en est suivie.

Alors, pourquoi ne pas faire un test? Eh bien, Gianni, tu n’y traînes sans doute pas souvent tes cravates, mais sache qu’en France, le hors-jeu au niveau de la surface, ça existe depuis belle lurette, jusqu’en U11 en fait. Est-ce que ça marche? D’un côté, c’est vrai qu’on y voit des buts. Des fois même des beaux.

"Des gamins totalement perdus face à la notion de bloc-équipe"

Mais sais-tu ce qu’on voit, aussi, l’année d’après, en fin de pré-formation, quand les Balotelli des bacs à herbe découvrent le premier football "de compétition"? Des gamins totalement perdus face à la notion de bloc-équipe, des attaquants statiques à force d’avoir pu attendre le ballon tout cuit à 60 mètres de l’action, des chandelles improbables loin devant, derrière lesquelles les enfants courent.

Alors, c’est sûr, tu n’es pas responsable des errements de la FFF et de ses règlements de jeunes parfois stupides et abscons. Mais, allez, Gianni, repasse toi un petit DVD collector estampillé FIFA des plus belles actions de ces dernières années. Cela paraît bête, mais à faire n’importe quoi avec les règles du jeu, on en sort aussi les artistes.

Avec une réforme comme ça, plus d’entrejeu, plus de petit périmètre où les Messi, Iniesta, Zidane, ont pu exprimer leur talent. Plus de cohérence, de cohésion, de ratisseur laborieux haut comme trois pommes.

A défaut d’étoiles, il y aura de l’espace à dévorer tu me diras. Après tout, Bolt n’a-t-il pas entamé sa reconversion?"

Par Mickaël Ponchon