Lignes Intercités déficitaires… la grande inquiétude des usagers

- - John Mac Dougall - AFP
Que va faire l'État des trains Intercités ? Le secrétaire d'État aux transports Alain Vidalies présente ce vendredi une nouvelle feuille de route pour les "Trains d'équilibre du territoire" (nouveau nom des trains Intercités, les lignes nationales hors TGV, anciennement Corail) pour les prochaines années. Des liaisons qui sont devenues un gouffre financier pour la SNCF. Ces trains empruntés par 32 millions de voyageurs sont très déficitaires.
Le déficit des Intercités pourrait grimper à 450 millions d'euros cette année après avoir atteint 400 millions d'euros l'an dernier.
"La SNCF n'en veut plus de ces trains de nuits"
L'une des pistes du gouvernement, c'est notamment d'ouvrir à la concurrence les trains de nuit. 12 lignes seraient ouvertes à d'autres opérateurs que la SNCF. Des lignes vieillissantes et déficitaires qui à elles seules représentent 25% des déficits de la branche pour 3% des voyages, et qui risquent sinon d'être supprimées. "La SNCF n'en veut plus de ces trains de nuits, puisqu'elle a tout misé sur le TGV et parce que les régions lui ont payé des trains neufs pour les TER", explique Marc Fressoz, journaliste spécialiste transport à mobilicites.com, ce vendredi chez Jean-Jacques Bourdin. "Les trains de nuits sont de moins en moins remplis. Bon, c'est aussi parce que la SNCF a sous investi ce créneau, car elle n'a plus les moyens de payer des trains neufs donc elle a tendance à vouloir supprimer ces trains de nuit".
Des opérateurs privés pourraient-ils pour autant les rendre bénéficiaires ? "Des privés peuvent avoir une autre façon de gérer les choses, une autre approche commerciale. Une autre approche du service tout simplement, en décidant de mettre de l'argent sur de nouveaux trains avec de beaux aménagements et des services adaptés, notamment de restauration. Il y a des niches sur lesquels les trains de nuit peuvent s'épanouir", estime Marc Fressoz.
Suppression de lignes: "Qu'est-ce qui va être mis en place ?"
Si des trains de nuits pourraient disparaître, des lignes de jour pourraient également être purement et simplement abandonnées. C'est le cas du train Saint-Quentin-Cambrai, dans la région Nord-Pas-de-Calais-Picardie. Une ligne que des habitants de Cambrai empruntent pourtant tous les jours pour aller travailler à Paris.
C'est le cas d'Angélique, qui l'emprunte quotidiennement : 2h10 de trajet le matin, et 2h10 le soir. Un quotidien déjà très compliqué, qui deviendrait carrément impossible si une partie de la ligne était supprimée.
"Qu'est-ce qui va être mis en place ?", s'inquiète-t-elle sur RMC. "On parle de bus, mais je vais devoir me lever à quelle heure ? Ça va être des pannes matérielles, des bouchons, des accidents sur la route, un chauffeur de bus qui n'est pas là… Et comment ça va être géré ? Les trains c'est déjà compliqué, alors les bus…".
En effet, certaines lignes pourraient aussi être transférées sur la route, c'est à dire remplacées par des autocars, comme les liaisons Toulouse-Hendaye ou Clermont Ferrand - Béziers. Comme Angélique, ils sont une trentaine d'usagers à prendre régulièrement ce train Saint-Quentin-Cambrai.
Et comme Angélique, ils n'ont pas vraiment le choix. "On a un travail auquel on tient, sinon on ne ferait pas tout ça. Nous habitons dans le Nord où le taux de chômage est élevé, donc on vient travailler là où il y a du travail. On a l'impression qu'on nous met des bâtons dans les roues. On se demande ce qu'on va faire".
"Il faut redynamiser ces liaisons Intercités"
La SNCF, elle, a un seul mot à la bouche, rentabilité. C'est vrai que le nombre de voyageurs a chuté de 20% en cinq ans et que ces lignes sont, elles aussi, largement déficitaires. Pourtant, selon Gilles Laurent, vice-président de la Fédération des usagers des transports, il faut changer la manière de voir le problème. "Au lieu de s'enclencher dans une spirale du déclin il faut redynamiser ces liaisons Intercités en proposant des correspondances qui fonctionnent bien et en faisant un réseau cohérent, qui soit maillé, au lieu d'avoir comme aujourd'hui des lignes dispersées sur le territoire et sans connections entre elles. Comme ça on aura plus de monde, cela ferait plus de trains optimisés et remplis, donc rentables."
Les 100.000 usagers de ces trains Intercités vont encore devoir patienter. Les arbitrages du gouvernement ne devraient être connus que d'ici plusieurs semaines.