Marine Le Pen ouvre le cahier de doléances des agriculteurs

Marine Le Pen en visite au Salon de l'Agriculture, vendredi. La candidate du Front national à la présidentielle a souhaité y ouvrir "le cahier de doléances" de la ruralité et a prôné des mesures "d'autorité" permettant au monde paysan de vivre décemment. - -
par Gérard Bon
PARIS (Reuters) - Marine Le Pen a voulu vendredi ouvrir "le cahier de doléances" de la ruralité lors d'une visite au Salon de l'agriculture à Paris, où elle a prôné des mesures "d'autorité" permettant au monde paysan de vivre décemment.
Accueillie par des sympathisants, la candidate du Front national à la présidentielle a dit vouloir rendre aux agriculteurs "non seulement leurs revenus, mais leur liberté", en enlevant notamment "un peu de pouvoir aux distributeurs".
"Je viens dire qu'on n'écoute pas les agriculteurs, qu'on ne les entend pas", a-t-elle dit au début d'une visite prévue pour durer six heures.
Dans une vive cohue, du stand du taureau champion du monde à celui des producteurs de lait, Marine Le Pen a pu mesurer sa percée dans le monde rural aux applaudissements et encouragements qui ont accompagné sa visite.
Selon deux sondages - Ifop et OpinionWay - diffusés à l'occasion du salon, la dirigeante du FN recueillerait de 15% à 17% des intentions de vote chez les exploitants agricoles, loin derrière Nicolas Sarkozy (40%) mais devant François Hollande (14% à 12%).
Elle devance le centriste François Bayrou (16%) dans l'enquête Ifop mais lui cède la deuxième position (18%) chez OpinionWay.
LE PEN FUSTIGE LE MODELE DES KOLKHOZES
"Beaucoup de nouveaux soutiens de Marine Le Pen chez les agriculteurs sont des déçus de Sarkozy, qui a mené une politique ultra échangiste", explique Philippe Loiseau, conseiller de la candidate pour les questions agricoles.
Marine Le Pen ne ménage pas ses efforts pour séduire le monde rural. Après un discours axé sur la ruralité dimanche dernier à Châteauroux (Indre), son équipe a ouvert un site internet dédié (www.ruralité2012.fr).
Mise en cause par les professionnels de la filière viande, qui lui ont reproché d'avoir lancé une polémique sur la viande halal, la présidente du FN a eu un débat à huis clos avec leurs représentants lors de sa visite du salon.
Les organisations professionnelles affirme qu'il est "absolument faux" que toute la viande vendue en Ile-de-France soit exclusivement halal, comme Marine Le Pen l'avait dit dans un premier temps. Par la suite, la dirigeante du FN a précisé ses propos, soulignant que toute la viande abattue était halal.
"J'ai exposé mes arguments avec conviction et énergie. Ça a été un débat intéressant, constructif, avec des gens de bonne volonté et confrontés, c'est vrai, à un certain nombre de difficultés", a-t-elle dit à Reuters.
"Je leur ai expliqué que le meilleur moyen de régler les problèmes était de les régler dans la transparence", a-t-elle ajouté.
Au nom du "patriotisme économique", Marine Le Pen prône le remplacement de la Politique agricole commune (PAC) de l'Union européenne par une Politique agricole française, la "PAF".
"L'agriculture est confrontée à des problèmes qui sont récurrents", a-t-elle dit, affirmant que "toutes les filières, sans exception, ont des difficultés."
Selon elle, l'immense majorité de ces difficultés sont liées aux "injonctions de l'Organisation mondiale du commerce (OMC) auxquelles se soumettent l'UMP, le gouvernement, et qui consistent à la dérégulation totale de l'agriculture".
Déplorant que les prix soient fixés par les marchés, et non par les filières, dans un but spéculatif, elle a aussi mis en cause la grande distribution et prôné des "mesures d'autorité".
Pour Marine le Pen, il faut permettre aux organisations professionnelles "de fixer elles-mêmes les prix" afin que les agriculteurs ne soient plus contraints de vendre à perte.
Marine Le Pen a également reproché au gouvernement de vouloir "supprimer la liberté" des agriculteurs en "poussant, avec l'aide de l'Union européenne, à l'hyperconcentration".
"On prend comme modèles les kolkhozes ultralibéraux ukrainiens qui ont remplacé les kolkhozes communistes ukrainiens. C'est absurde. Ça n'est pas cela que nous voulons. Nous voulons la défense des exploitations familiales", a-t-elle dit.
Edité par Sophie Louet