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"On aurait pu éviter ce drame": un syndicat incrimine les juges d'instruction dans l'affaire Amra

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L'évasion de Mohamed Amra, qui a coûté la vie à deux agents pénitentiaires le 14 mai dernier durant l'attaque de son convoi "aurait pu être évitée", selon Emmanuel Baudin, du syndicat FO-Justice. Il estime sur RMC que les juges d'instruction n'ont pas transmis assez d'informations à l'administration pénitentiaire.

A qui la faute? Le 14 mai, le capitaine pénitentiaire Fabrice Moello et le surveillant brigadier Arnaud Garcia ont été abattus par un commando armé, qui a intercepté au péage autoroutier d'Incarville leur convoi transportant un détenu multirécidiviste, Mohamed Amra. Trois autres agents pénitentiaires ont été gravement blessés dans cette embuscade.

"L'issue de cette enquête, ce dont je ne doute pas un instant, sera l'interpellation des auteurs et l'ouverture d'une information afin qu'ils répondent de leurs actes devant la cour d'assises", a assuré la procureure de la République de Paris, sur BFMTV le 21 mai dernier, expliquant les enquêteurs étaient sur des "pistes sérieuses".

En attendant, le malfrat est dans la nature, et les révélations des conditions de détention très clémentes de Mohamed Amra à la prison de la Santé ont choqué beaucoup de monde. Livraison de repas Deliveroo, chicha, téléphones portables... Il continuait à organiser son trafic de drogue depuis sa cellule. Il aurait même cherché à commander des armes automatiques selon les sources de BFMTV, alors même que sa cellule était sous écoute.

"Des gens savaient mais ils ne nous ont pas dit"

Des informations "scandaleuses" pour Emmanuel Baudin, secrétaire général de FO-Justice invité des Grandes Gueules sur RMC vendredi 24 mai. "J'ai entendu cela en rentrant de l'hommage. J'étais abasourdi. Si on avait su cela, on aurait pu éviter le drame, nos collègues seraient en vie et il n'y aurait pas eu besoin d'hommage national", juge-t-il.

"Il a pu faire tout cela car l'administration pénitentiaire n'était pas informée de ce qui se disait. Le surveillant ne sait pas si la cellule est sonorisée. La direction de l'établissement sait, mais ne sait pas pourquoi", explique-t-il.

Le détenu n'était ainsi pas considéré comme un DPS, détenu particulièrement signalé. "(Si on savait), il n'aurait jamais été mis à Evreux, il aurait été escorté, sorti avec les équipes régionales d'intervention du GIGN pénitentiaire. Des gens savaient mais ils ne nous ont pas dit", estime-t-il.

Emmanuel Baudin, secrétaire général FO Pénitentiaire : "M.Amra a pu faire ça parce que l’administration pénitentiaire n’a pas été prévenu de ce qu’il préparait" - 24/05
Emmanuel Baudin, secrétaire général FO Pénitentiaire : "M.Amra a pu faire ça parce que l’administration pénitentiaire n’a pas été prévenu de ce qu’il préparait" - 24/05
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"Chez nous, on dit: il y a Dieu et il y a les juges"

Emmanuel Baudin pointe du doigt le juge d'instruction en charge du dossier Amra.

"La police écoute, transmet au juge d'instruction les écoutes. Si le juge avait tout ces éléments et ne les a pas transmis à l'administration pénitentiaire, je pense qu'il faut qu'il rende des leçons", enrage-t-il.

"Chez nous, on dit: il y a Dieu et il y a les juges", illustre-t-il. "Les deux syndicats majoritaires (des magistrats) refusent le déploiement (des audiences) par visio, ils refusent de venir dans les établissement pénitentiaires... Ces gens sont dans un pré carré, se protègent, et peu importe les risques qu'ils font encourir à la pénitentiaire, alors qu'on est dans le même bateau", explique-t-il.

"On aurait pu éviter ce drame", conclut-il.

La guerre est-elle perdue?

Quelles solutions pour éviter cela à l'avenir? Emmanuel Baudin estime qu'il faut simplement plus de moyens, alors qu'il explique avoir déjà été témoin de livraisons par drone aux fenêtres des cellules de détenus.

Emmanuel Baudin, secrétaire général FO Pénitentiaire : "Des drones livrent directement les détenus à la fenêtre de leur cellule !" - 24/05
Emmanuel Baudin, secrétaire général FO Pénitentiaire : "Des drones livrent directement les détenus à la fenêtre de leur cellule !" - 24/05
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"Il y a des choses à faire. Pendant longtemps, on a voulu acheter la paix sociale et on a voulu éviter que ça explose. Donc on a laissé faire un peu. Là, je pense que depuis un moment, on commence (à inverser la tendance)", juge-t-il, approuvant notamment la volonté du gouvernement de mettre en place plus de chiens de détection de drogue et d'attaque, ainsi que des brouilleurs de téléphone portable.

J.A.