Attentat de l'Hyper Cacher: "Je suis à 2m50 de lui au moment où il sort son arme"
Le 9 janvier dernier, la panique est totale dans Paris. Ce jour-là Amedy Coulibaly pénètre lourdement armé dans l'Hyper Cacher situé Porte de Vincennes. Il tue immédiatement trois personnes et en prend en otage dix-sept autres, dont l'un est tué peu après, portant à quatre le nombre de victimes. Près de trois mois après les faits, les langues commencent à se délier. Ce jeudi, un des policier du RAID a raconté au Parisien comment il avait vécu l'assaut contre Amedy Coulibaly. Ce vendredi, sur RMC, une autre personne a décidé de briser le silence sur ce qu'il s'est passé ce jour-là.
Ce témoignage c'est celui de David (prénom d'emprunt). Le 9 janvier, il était dans sa voiture devant le supermarché lorsqu'il voit Amedy Coulibaly arriver puis ouvrir le feu à l'entrée du magasin. Aujourd'hui, il a encore du mal à oublier et notamment un instant précis: à 13h06, ce vendredi, l'heure à laquelle Amedy Coulibaly ouvre le feu. "J'entends un coup de feu. Je me dis que c'est un pétard ou quelque chose du genre. La phrase que je me dis c'est ça: 'Qui a jeté un pétard?'", raconte-t-il dans Bourdin Direct.
"Personne n'aurait rien pu faire"
David est à ce moment-là dans sa voiture avec un ami. Ils viennent de se garer pour aller acheter du champagne avant de partir en week-end. Mais son ami veut fumer une cigarette. Encore au volant de sa voiture, il voit donc passer sur le trottoir un homme, sac de sports à l'épaule, qui se dirige droit vers le magasin. "Il était calme, très calme. On s'est dit que c'était un jeune qui sortait du sport… Sans courir, sans crier… Il n'a rien dit, pas un mot… Et il est rentré", se souvient David.
En quelques secondes, dès son entrée dans le magasin, Amedy Coulibaly abat froidement 3 personnes. David reste lui figé au volant de sa voiture, comme paralysé. Il mettra de longues minutes avant de prendre la fuite. Une attitude qu'il a encore du mal à comprendre. "C'est plus ça d'ailleurs qui m'embête. Mon moteur était démarré. Est-ce que j'aurais pu l'écraser? On se pose la question: 'Est-ce que?' Mais au fond de moi, je sais que je ne suis pas un héros. Je ne vais pas dire que j'aurais pu faire quelque chose. Non, ce n'est pas vrai. Personne n'aurait rien pu faire. Je vais être franc, je n'ai pensé qu'à une chose sur le coup: à moi. Il fallait que je m'en aille…", confie-t-il à RMC.
"A dix secondes près…"
Aujourd'hui, David n'a pas repris le travail. Il a eu un entretien avec une psychologue mais impossible de tourner cette page. Le jeune homme se refait sans cesse le scénario de cette journée: "Si on avait été dedans… A dix secondes près... Si mon pote n'avait pas eu envie de fumer… S'il n'était pas venu manger avec moi parce qu'à l'origine ça ne devait pas être le cas… Je suis à 2m50 de lui au moment où il sort son arme..."
Ou encore: "Si tout bêtement il tourne la tête à droite, je suis dans la voiture… Si tout bêtement, lui avait mis trois minutes de plus à arriver… Il aurait pu arriver à 13h12 et là j'aurais été dedans…". Depuis David est retourné à l'Hyper Cacher. Et symboliquement il a acheté cette bouteille de champagne comme il avait prévu de le faire le 9 janvier dernier.