Charlie Hebdo: "J'aurais dû être là, entre Honoré et Tignous", raconte Antonio Fischetti

Antonio Fischetti, ce jeudi matin chez Jean-Jacques Bourdin. - Capture RMC Découverte
Il aurait dû être là, parmi les victimes de Charlie Hebdo: Charb, Cabu, Wolinski, Tignous et les autres… S'il a eu la chance d'être absent mercredi dans les locaux de Charlie Hebdo lors de l'attaque meurtrière, Antonio Fischetti, journaliste rédacteur depuis 15 ans au journal satirique, a perdu plus que des collègues, "des amis".
"Hier je n'étais pas là, j'aurais dû y être, mais j'étais aux obsèques de ma tante en province. Sinon, j'aurais été à ma place habituelle, entre Honoré et Tignous", a raconté ce jeudi chez Jean-Jacques Bourdin celui qui tient la chronique hebdomadaire "L'empire des sciences", dans Charlie Hebdo. "J'ai appris la catastrophe en sortant des obsèques", rajoute-t-il, la voix tremblante d'émotion.
"Ils savaient que le mercredi toute l'équipe était réunie"
Pour lui, les tueurs n'ont pas agi au hasard. "Les terroriste savaient que le mercredi, c'est la réunion hebdomadaire. C'est le cas tous les mercredis matin depuis des années, entre 10h et 13 heures, nous avons cette réunion. C'était le seul moment où toute l'équipe était réunie. Le mercredi matin, tout le monde était là".
Antonio Fischetti était conscient des risques qui pesait sur Charlie Hebdo et ses collaborateurs, notamment depuis l'affaire des caricatures de Mahomet publiées par l'hebdomadaire. "On savait qu'il y avait un risque, mais on se disait qu'il pesait à priori d'abord sur Charb, sur les symboles du journal. Mais là vouloir tuer tout le monde et éradiquer tout un journal... Ils ont tué un correcteur, Mustapha, qui ne vient jamais le mercredi et qui était là par hasard", se désole-t-il.
"Au fil du temps, la vigilance se relâche"
Antonio Fischetti assure qu'il n'avait pas vraiment "la peur au ventre". "Le risque, on le connaissait. On était lucide, on n'était pas paranoïaque, parce qu'on savait que ce qu'on avait à faire était plus fort que le risque". Toutefois, il reconnaît qu'"au fil du temps, la vigilance se relâche. La première affaire des caricatures remontent à 2006, ça fait longtemps".
Le chroniqueur raconte que depuis l'incendie des locaux du journal en 2011, juste avant la publication d'un numéro spécial "Charia Hebdo", "il y avait une protection policière permanente, avec une voiture des police devant le journal. Après c'était seulement le mercredi matin. Et puis, il y a deux mois, j'avais remarqué qu'il n'y avait plus de voiture de police en permanence. Les policiers faisaient des rondes de temps en temps. J'avais fait la remarque à Charb. Les tireurs avaient dû le remarquer. Ça ne les aurait peut-être pas forcément empêché de rentrer, mais c'est quand même dissuasif".
"Il faut absolument que Charlie survive à ça"
S'il avoue s'être posé la question de l'avenir de Charlie Hebdo, sous le choc de l'annonce de l'attaque, il estime maintenant que l'hebdomadaire doit continuer à vivre. "Des gens comme Charb, Cabu, Wolinski, sont uniques. Mais il ne faut pas donner raison (aux tueurs). Il faut absolument que Charlie survive à ça parce que sinon c'est leur donner raison. C'est la dernière chose à faire".
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