“J’ai peur de sortir”: après la mort d’un homme dans son lit à Dijon, les voisins vivent dans l’angoisse

Vers 00h30, "au moins deux" individus circulant en voiture ont effectué "plusieurs tirs d'armes à feu sur la façade" d'un immeuble du quartier sensible de Stalingrad, dans le nord-est de Dijon, connu comme un "point de deal", a indiqué lors d'une conférence de presse le procureur de la République à Dijon Olivier Caracotch.
Selon les premiers éléments de l'enquête, une balle perdue a alors tué un homme de 55 ans, qui dormait dans son appartement, avec son épouse et ses deux enfants.
Une "victime bien dramatique et bien malheureuse"
L'homme a été "mortellement atteint alors qu'il était allongé dans son lit", a précisé Olivier Caracotch, évoquant une "victime bien dramatique et bien malheureuse qui n'a été touchée que par le fait qu'il habitait immédiatement au-dessus" de ce point de deal.
"Mon père et moi, avec ma mère, on a été réveillé par une succession de coups de feux puis ça s'est arrêté", a expliqué la fille de la victime, âgée de 23 ans, interrogée par l'AFP au pied de son immeuble.
"Puis ça a repris, et quand on est allé voir mon père qui dormait dans son lit, il était mort", a-t-elle déclaré avant de fondre en larmes.
La jeune femme, souhaitant garder l'anonymat, a précisé que son frère de 24 ans se trouvait également dans l'appartement de cette famille kosovare arrivée en France il y a 14 ans. Selon une source policière, le ou les tireurs ont utilisé un fusil mitrailleur.
Les tireurs toujours en fuite
"C'est inacceptable qu'une personne soit tuée, victime collatérale des points de deal", a déclaré le maire PS de Dijon, François Rebsamen, évoquant une "famille respectable qui n'a jamais eu de problème".
Les tireurs présumés sont toujours en fuite, a précisé le parquet. Mais leur voiture a été retrouvée, selon une source policière. D'après la fille de la victime, "il y a quelques années, il y a déjà eu des coups de feu sur la façade de l'immeuble qui avaient déjà touché notre appartement".
Le procureur a confirmé qu'il "y avait déjà des incidents" sur ce point de deal, "pas très actif, mais référencé", sans pouvoir préciser si l'appartement de la victime avait déjà effectivement été touché.
"C'est inédit, grave et inacceptable", a insisté le préfet de Bourgogne-Franche-Comté, Franck Robine, se félicitant de l'arrivée prochaine de la CRS 8, l'unité de CRS spécialisée dans le maintien de l'ordre, comme annoncé par le ministère de l'Intérieur.
Des voisins encore sous le choc
Ce règlement de compte n’a rien d’un hasard pour les habitants qui constatent depuis des mois une hausse dans la violence près de chez eux et qui pour certains se sont vus mourir.
Enroulé dans leur couette, les yeux encore gonflés de cernes par une nuit sans sommeil, un jeune couple, interviewé par RMC, a vu la mort en face samedi soir, en entendant les premières balles claquer.
“Ma grand-mère voulait absolument voir ce qu’il se passait, elle a ouvert les volets, elle est allée sur le balcon. Je lui ai dit de surtout pas y aller”, raconte la jeune femme.

“On est miraculé. On a vu un mec nous braquer directement. Quand on a vu l’arme sur nous, je me suis demandé si c’était la fin, qu’est-ce qu’il allait se passer ensuite. J’arrivais même plus à parler, je tremblais. Ils ont rafalé tout le bâtiment”, relate ensuite son conjoint.
Encore très ému, il poursuit: “ demain, je dois aller au travail, mais j’ai peur de sortir du bâtiment. Normalement, on se sent en sécurité chez soi, mais avec ce qu’il vient de se passer, ce n’est plus le cas”.
Un climat tendu depuis plusieurs mois
À l’extérieur, toute la façade de l’immeuble est criblée de balles. Alors certains riverains le disent, il y a toujours eu du deal, du trafic, dans ces cages d’escalier défraichies. Mais depuis quelques mois, le climat s’est tendu.
“Depuis six mois, c'est régulier, il y a des rixes, des bagarres, ça pète de partout. Ils ne craignent pas les forces de l’ordre. Mes enfants, ils ont peur. Le plus petit n’arrive même plus à dormir tout seul. C'est plus vivable pour eux”, témoigne Ingrid, une voisine.
Pour cette maman, comme pour d’autres voisins rencontrés: la priorité désormais, c'est de pouvoir déménager au plus vite.