"C’est l’enfer": le témoignage d’un boulanger agressé qui jette l'éponge et ferme son magasin

"Fermeture indéterminée pour cause de grave agression". C’est l’affichette qui informe les clients sur la vitrine de la boulangerie La Mie câline à Creil (Oise). Jérôme (*), le gérant, a été victime d’un violent home-jacking dans la nuit du 15 au 16 mai. La dernière agression d’une longue liste qui le pousse à quitter son commerce. Selon Le Parisien, la franchise a également acté son retrait définitif de la ville. "Physiquement, on se répare. Mais psychologiquement, moralement, c’est très compliqué. Au bout d’un mois, c’est encore des nuits blanches, des bruits qui font sursauter. C’est l’enfer", témoigne Jérôme dans "Apolline Matin" ce lundi sur RMC et RMC Story.
"Je pars tous les jours vers 2-3h du matin, pour aller au magasin, raconte-t-il sur cette nuit d’effroi. J’habite assez loin de mon lieu de travail. Je rentre dans la voiture, on casse une vitre et on me sort. Là, des violences commencent, pendant 1h30. Des coups de marteau, de poing, de pied… On veut m’égorger, me couper les doigts, pour que j’avoue où se trouve l’argent que je suis censé avoir dans un coffre, alors que je n’ai rien. Ça dure très longtemps. Je pensais que j’allais mourir. J’ai fini par leur dire qu’il y a un peu d’argent au magasin, parce que je n’avais rien à la maison. Ils pensaient que j’avais de l’argent à mon domicile. On m’emmène au magasin, ils prennent le peu qu’il y a, et les cartes bleues, pour retirer de l’argent au distributeur. Tout ça pour pas grand-chose…" Un peu moins de 3.000 euros dans le fonds de caisse.
"Il n’y a rien à voler"
A force d’être agressé, le boulanger vit dans l’angoisse. "Sortir dans la rue, monter la voiture, démarrer feux éteints le plus vite possible… Et on décompresse un peu une fois qu’on roule. Mais devant le magasin, c’est pareil, on a l’angoisse en descendant de la voiture. Ce n’est pas possible de vivre et d’aller travailler comme ça, confie Jérôme. C’est le deuxième home-jacking depuis sept, huit ans. Il y a eu une dizaine de faits, depuis 15-16 ans. Six cambriolages, deux braquages à main armée, deux home-jacking… On n’a plus rien, on n’a plus d’espèces et de toute façon les gens payent en carte bleue. Il n’y a rien à voler. A chaque fois, on pense que c’est fini, qu’ils ne reviendront pas, on se relève, on repart. En fait, si, ils reviennent quand même. La violence va crescendo. Il n’y a pas de sécurité dans la ville."
Et sa boulangerie n’est pas la seule à subir des menaces. "Les autres commerçants sont tous dans l’angoisse, le stress au quotidien, assure Jérôme. Il y a du trafic de drogue, de cigarettes, devant les commerces, en toute impunité. On se bagarre tous les jours avec des gens comme ça. On a prévenu la police, la mairie. Parfois, on les interpelle, mais trois ou quatre heures après, ils sont de nouveau devant les commerces, en plein centre-ville, devant la gare."
(*) Le prénom a été changé