"Ma fille a reçu des tranches de jambon sur la tête": la montée de la haine inquiète

Ils avaient des battes de baseball, des barres de fer, des mortiers... Et avaient "l’intention de s’opposer soit aux habitants de Romans, soit aux forces de l’ordre". Le préfet de la Drôme, Thierry Devimeux, a confirmé ce lundi matin sur RMC le bilan de 24 interpellations dans le week-end, après qu’une centaine de membres de l’ultra-droite ont cherché à défiler dans le quartier de la Monnaie, à Romans-sur-Isère, d’où sont originaires une partie des suspects dans l’affaire de la mort de Thomas (16 ans) à Crépol. Les images de ces personnes encagoulées qui tentent de pénétrer dans un quartier, avec "des armes par destination" selon les termes du préfet, illustrent une montée de la haine qui inquiète.
"Je suis inquiet parce qu’il n’y a plus le côté humain, en France... Il y a une montée de haine, on mélange tout. La récupération (politique) fait peur aussi. Ça monte au cerveau de beaucoup de personnes, qui ne comprennent pas le vrai combat, qui mélangent tout", explique Valentin, auditeur RMC. Avec des propos stigmatisants de responsables politiques, ou des absences de condamnation de leur part, qui peuvent avoir des répercussions concrètes et dangereuses.
Dominique Sopo, président de SOS Racisme, les appelle "à se ressaisir très fortement", en pointant une libération de la parole raciste "de plus en plus à l'extrême droite mais aussi à droite avec des personnages comme Eric Ciotti (président de LR, NDLR)". Fabien Roussel, le secrétaire national du Parti communiste, alerte lui sur le fait que "l’extrême droite est en train de nous mener vers l'autoroute de la guerre civile en Europe".
"Le risque d'un basculement de notre société"
Cette montée de haine "fait peur" à Fadela. "Ma fille de 15 ans, l’année dernière, a reçu des tranches de jambon sur la tête en cours de physique, témoigne cette infirmière libérale sur RMC. Elle n’était pas bien quand elle est rentrée. C’est une excellente élève. Je suis intolérante sur les résultats scolaires, comme l’étaient mes parents issus de l’immigration, qui ne savaient ni lire, ni écrire. On en a discuté, je lui ai demandé si je devais faire quelque chose vis-à-vis du collège et elle m’a dit non. Mais je voyais qu’elle n’était pas bien, donc je l’ai fait. Ces gamins-là ont été reçus par la CPE et ont eu le sermon habituel, ‘ce n’est pas bien’. Il n’y a pas eu de sanction."
"Moi, je suis issue de l’immigration, intégrée totalement, ajoute Fadela. Je ne pratique aucune religion, je n’ai pas de tabou là-dessus. Je n’aime pas trop ce mot ‘intégration’, parce que je ne sais pas ce qu’il veut dire. Est-ce que c’est par le travail, par la religion, par le fait de payer des impôts? Je connais des gens d’origine française qui ne travaillent pas, qui ne paient pas d’impôts… Est-ce qu’on les appelle ‘pas intégrés’? C’est quoi la différence?"
Olivier Véran, le porte-parole du gouvernement, a mis en garde ce lundi sur "le risque d'un basculement de notre société, si nous ne sommes pas à la hauteur". "La violence ne doit pas répondre à la violence", a-t-il lancé en fustigeant "ceux qui crient vengeance au lieu de réclamer justice".