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Faits divers

Manche: deux migrants meurent dans le naufrage de leur embarcation

Cette photo aérienne prise le 16 septembre 2023 depuis un avion de la police française aux frontières (PAF) montre des migrants à bord d'un canot utilisé pour le trafic illicite alors qu'ils tentent de traverser la Manche vers la Grande-Bretagne depuis une plage du Touquet, nord de la France.

Cette photo aérienne prise le 16 septembre 2023 depuis un avion de la police française aux frontières (PAF) montre des migrants à bord d'un canot utilisé pour le trafic illicite alors qu'ils tentent de traverser la Manche vers la Grande-Bretagne depuis une plage du Touquet, nord de la France. - Sameer Al-DOUMY / AFP

Deux migrants, un homme et une femme d'une trentaine d'années, sont morts mercredi dans la Manche, dans le naufrage de l'embarcation sur laquelle ils tentaient de gagner l'Angleterre. Une enquête a été ouverte pour homicide involontaire aggravé et blessures involontaires aggravées.

Les traversées de la Manche vers l'Angleterre ont fait deux nouvelles victimes: un homme et une femme sont morts mercredi 22 novembre 2023 dans le naufrage de leur embarcation, deux ans presque jour pour jour après le drame qui avait coûté la vie à 27 migrants.

Ces deux migrants, âgés d'une trentaine d'années, se trouvaient à bord d'un bateau sur lequel s'entassaient une soixantaine de personnes, qui a chaviré peu après être parti vers 13h30 d'une plage entre Neufchâtel-Hardelot et Equihen-Plage (Pas-de-Calais), a précisé à l'AFP le procureur de Boulogne-sur-mer, Guirec Le Bras.

Une troisième victime a été hélitreuillée et les 57 autres naufragés "ramenés sur le bord".

Une enquête ouverte

Selon Guirec Le Bras, plusieurs embarcations sont parties de cette plage mercredi matin, malgré la présence des gendarmes, qui n'ont pas réussi à empêcher tous les départs de la matinée.

Une enquête pour "homicide involontaire aggravé", "blessures involontaires aggravées" et "aide au séjour d'un étranger en situation irrégulière" a été ouverte.

D'après la préfecture maritime de la Manche et de la Mer du Nord (Prémar), l'embarcation s'est trouvée en grande difficulté "à moins d'un kilomètre de la plage".

Six bateaux et un hélicoptère ont été mobilisés, l'hélicoptère permettant de localiser les deux disparus, inanimés, qui n'ont pas pu être réanimés. Plusieurs autres naufragés se trouvaient en état d'hypothermie, précise la Prémar dans son communiqué.

"Abattu et en colère"

Une tente a été montée à Boulogne-sur-Mer pour accueillir les rescapés, dont certains étaient recouverts de couvertures de survie mercredi soir, au milieu de véhicules de la protection civile et des pompiers, a constaté un correspondant de l'AFP.

Olivier Ternisien président d'Osmose 62, qui vient en aide aux exilés dans le Boulonnais, s'est dit "abattu et en colère", déplorant la présence croissantes des gendarmes sur le littoral au moment des départs, "ce qui renforce les prises de risque" des exilés.

Jamais auparavant, ils n'auraient tenté de prendre la mer sur "une fenêtre météo aussi courte" que celle de ce mercredi, a-t-il estimé.

Julie, une coordinatrice de l'association Utopia56 à Calais, qui ne souhaite pas donner son nom, s'est elle aussi dite "en colère, mais pas vraiment étonnée".

"Il n'y a toujours pas de voie de passage sûre et légale pour les personnes qui tentent de gagner l'Angleterre et les stratégies de militarisation de la côte ne servent qu'à faire prendre plus de risques", a-t-elle dénoncé.

Les derniers décès dans la Manche remontent au 12 août, quand six Afghans de 21 à 34 ans avaient perdu la vie dans un naufrage, le plus meurtrier dans le détroit du Pas-de-Calais depuis celui du 24 novembre 2021. Au moins 27 migrants avaient péri.

Une situation qui s'aggrave

Selon la préfecture des Hauts-de-France, le nombre moyen de passagers par embarcation pour ces traversées ne cesse de croître, avec "en moyenne 53 personnes par embarcation, soit un quasi doublement depuis 2021".

Depuis les années 1990 et après la fermeture en 2002 d'un centre de la Croix-Rouge à Sangatte (Pas-de-Calais) des centaines d'exilés s'entassent dans des tentes et des abris de fortune à Calais, Grande-Synthe ou Dunkerque pour tenter de rallier l'Angleterre, cachés dans des camions ou par bateau.

Selon les autorités britanniques, plus de 27.000 personnes sont arrivées au Royaume-Uni en traversant la Manche depuis le début de l'année, après un record de 45.000 en 2022.

La plupart demandent l'asile, ce qui a entrainé un engorgement du système d'accueil et de traitement de ces demandes.

Les autorités françaises procèdent régulièrement à des démantèlements de campements sur le littoral. Fin octobre, 5.452 personnes avaient été "mises à l'abri" depuis le début de l'année, selon la préfecture des Hauts-de-France.

"La situation de précarité de ces malheureux, qui veulent partir coûte que coûte, s'est aggravée depuis que l'on vide les camps de la région parisienne en prévision des Jeux olympiques", accuse Jean-Claude Lenoir, président de Salam, une autre association d'aide aux exilés.
CA avec AFP