Nice: "Après Charlie Hebdo j'ai continué à dire on n'a pas peur, aujourd'hui je suis terrorisée"

Manifestation de soutien après les attentats de Charlie Hebdo en janvier 2015. - Jeff Pachourd - AFP
Lors des manifestations de soutien après les attentats de Charlie Hebdo et de l'Hypercacher, les slogans "même pas peur" s'affichaient partout. Manon, une auditrice de RMC habitante des Pyrénées-Atlantiques fait partie de ceux qui voulaient dénoncer la terreur en appelant à continuer à vivre normalement. Mais depuis l'attaque de Nice jeudi soir qui a fait au moins 84 morts, Manon est désemparée. Qualifiée d'attentat par François Hollande, l'attaque au camion sur la promenade des Anglais n'a pour l'instant pas été revendiqué a tout changé pour cette auditrice.
"Les terroristes sont en train de gagner. J'ai toujours voulu depuis Charlie Hebdo continuer à dire on n'a pas peur, on continue à vivre comme on l'a toujours fait, on fait la fête on est Français, on est bien en France, mais maintenant j'ai peur, mes amis ont peur", confie-t-elle.
"L'apologie de la terreur va gagner"
Manon ne connaissait personne à Nice mais a pensé à sa famille qui assistait aussi à un feu d'artifice à Biarritz. "Si ça arrive à Nice, ça peut arriver partout (...). L'apologie de la terreur va gagner." Elle fait part de son incompréhension et reconnaît ne plus réussir à contenir sa peur.
"Je ne voulais pas devenir comme ça, mais aujourd'hui je suis terrorisée. Quand je vois qu'un camion écrase des familles, ils visent qui? Charlie Hebdo c'était visé, c'était pour passer un message particulier, là ils visent n'importe qui", constate-t-elle.
Comme des millions de Français, elle avait aussi été choquée par les attentats de novembre à Paris. Mais avec le temps, elle avait fini par passer à autre chose. "On n'oublie pas, mais ça passe. Mais là pour moi, c'est vraiment la goutte d'eau, c'est trop", poursuit Manon.
"On ne peut pas tout contrôler"
Jeudi soir à Nice fallait-il davantage de forces de police? Faut-il désormais envoyer des militaires pour encadrer les rassemblements? Vendredi matin, le candidat à la primaire Les Républicains Henri Guaino allait jusqu'à proposer d'utiliser des armes de guerre. "Il suffit de mettre à l'entrée de la promenade des Anglais un militaire avec un lance-roquette", a-t-il lancé sur RTL.
Manon, lucide, dresse un constat d'impuissance face au mode opératoire: "on ne peut pas tout contrôler". Cette habitante du sud-ouest s'inquiète pour les traditionnelles fêtes de Bayonne auxquelles elle a l'habitude d'assiste.
"Je fais les fêtes de Bayonne depuis que j'ai 14 ans, je n'ai jamais manqué une année. On les fait en famille, entre amis et on y pense (...) Les fêtes de Bayonne, il y a des milliers de personnes qui sont là. Donc on a peur", admet-elle.
Cette année, elle ne sait pas encore si elle y participera, pour elle en tout cas, la fête aura désormais un goût amer.