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Police-Justice

Procès pour violences sur un mineur requis contre un policier, dénoncées par un journaliste infiltré

Voiture de police devant un palais de justice (photo d'illustration)

Voiture de police devant un palais de justice (photo d'illustration) - AFP

Près de quatre ans après la parution du livre d'un journaliste qui racontait son infiltration dans un commissariat de la capitale, le parquet de Paris a requis un procès contre un policier ayant violenté un mineur lors de son interpellation.

Près de quatre ans après la parution du livre d'un journaliste qui racontait son infiltration dans un commissariat de la capitale, Flic, par Valentin Gendrot, le parquet de Paris a requis un procès contre un policier ayant violenté un mineur lors de son interpellation.

Dans son réquisitoire définitif signé le 11 juillet, le ministère public "a requis le renvoi devant le tribunal correctionnel de Marc F., policier à l'époque en poste au commissariat du XIXe arrondissement, pour des violences volontaires par personne dépositaire de l'autorité publique commises le 12 avril 2019" au préjudice d'un mineur, a détaillé ce mercredi 24 juillet le parquet à l'AFP, confirmant une information de Mediapart.

Un non-lieu a par ailleurs été requis "concernant d'éventuels faits de faux, pour lesquels personne n'avait été mis en examen", a-t-il précisé. Contacté, l'avocat de Marc F. n'a pas réagi immédiatement. Il revient désormais à la juge d'instruction de se prononcer sur la tenue d'un procès ou non.

Tabassages et pratiques "racistes"

Violences, insultes racistes et homophobes mais aussi manque de moyens, suicide et mal-être des troupes: dans cet ouvrage paru en septembre 2020, le journaliste raconte son infiltration en tant qu'adjoint de sécurité (ADS) au commissariat du XIXe arrondissement en 2019.

Il explique avoir assisté à plusieurs "tabassages" et témoigne de pratiques "racistes" de la part de certains fonctionnaires. "Seul l'un des passages relaté dans le livre a permis de retrouver une procédure pouvant documenter des violences policières" lors de l'interpellation d'un mineur pour rébellion et menaces en 2019, selon le parquet.

Le gardien de la paix, âgé désormais de 36 ans, avait déposé une plainte pour outrage et menaces sur personne dépositaire de l'autorité publique qui a conduit au placement en garde à vue du mineur.

Parallèlement, ce dernier, qui présentait "un hématome à l'arcade sourcilière gauche et une excoriation cervicale droite", avait dénoncé les violences commises par un policier, a relaté le parquet. 

"Patate" avec "le poing"

Selon le réquisitoire définitif de 15 pages consulté par l'AFP, Marc F. avait qualifié le livre de Valentin Gendrot d'"orienté et mensonger" lors d'un interrogatoire.

Il avait concédé qu'il "manquait des éléments" relatifs aux violences dans le PV d'interpellation "sans pour autant admettre qu'il s'agissait d'un faux, estimant qu'il pouvait s'agir d'(un) oubli de sa part" ou que le collègue qui avait rédigé le document "ait pu manquer des éléments".

Marc F., surnommé "Mano", avait contesté certains coups allégués par Valentin Gendrot, mais reconnu une "percussion avec la main ouverte" assénée à l'adolescent au commissariat. Dans un enregistrement clandestin fait par M. Gendrot à l'époque, on l'entend parler d'une "patate" avec "le poing droit". Marc F. a également reconnu avoir poussé le mineur "pour le contraindre à s'asseoir alors qu'il s'y refusait", selon le réquisitoire définitif.

Il avait été mis en examen pour violences par personne dépositaire de l'autorité publique et placé sous le statut de témoin assisté pour faux par personne dépositaire de l'autorité publique. Cette infraction lui faisait risquer les assises. 

L'IGPN avait pointé des "manquements"

"Je regrette que la justice ne fasse pas preuve de la même exigence et de la même rigueur quand il s'agit de fonctionnaires de police et de justiciables lambdas", a réagi auprès de l'AFP l'avocat de Valentin Gendrot, Me Romain Boulet, faisant référence au PV d'interpellation tronqué. "Si ce réquisitoire définitif annonce un procès a minima, ce que je regrette, force est de constater que la justice valide le sérieux du travail de Valentin Gendrot", a-t-il ajouté.

Après la publication de l'ouvrage, la préfecture de police avait saisi l'Inspection générale de la police nationale (IGPN) d'une enquête administrative. Dans son rapport, daté de janvier 2021, l'IGPN avait pointé des "manquements professionnels et des comportements contraires à la déontologie policière". 

Marc F. avait été sanctionné d'une exclusion de trois jours avec sursis et trois autres agents avaient reçu des blâmes, notamment pour ne pas avoir retranscrit dans le PV d'interpellation les coups reçus par le mineur.

RMC avec AFP