Rhône: une mairie refuse d’enlever les vitraux d’un prêtre pédocriminel et en appelle à l’Eglise

Elle s’appelle Annick. Comme des centaines d’autres, elle a été violée par l’Abbé Louis Ribes dans les années 70. Une affaire révélée l’année dernière. Depuis, les crimes de l’abbé ont été reconnus par l’Église, mais il ne sera jamais jugé, il est mort il y a 30 ans.
Dans le milieu catholique, Louis Ribes était surnommé "le Picasso des églises". Son art n’était qu’un prétexte: dans son atelier, il violait des enfants dont il se servait de modèles pour ses dessins. De ces crimes sont nés une quinzaine de vitraux qui ornent des lieux de culte dans 11 villes de la région lyonnaise.
A la demande des victimes, ils vont tous être retirés. Tous, sauf 2 : à Givors, le maire s’y oppose. Annick est désespérée: "On demande que ça disparaisse. C'est agressif pour nous de revoir ces productions, ça nous rajoute une souffrance supplémentaire de savoir qu'elles sont encore visibles par tout le monde. Cela nous ramène à ce que l'on a vécu et on ne peut pas dissocier l'homme de l'artiste, puisque c'est pendant que nous servions de modèle que les agressions avaient lieu", raconte-t-elle à RMC.
"Distinguer l'œuvre de l'artiste"
Les lieux de culte datant d’avant 1905, comme la chapelle de Givors, appartiennent à l’Etat, c’est donc la responsabilité des villes.
Et la conviction personnelle de Mohamed Boudjellaba, le maire de Givors, est claire: pour lui, les vitraux doivent rester car il faut "distinguer l’œuvre de l’artiste". Mais "à ce stade, aucune décision définitive n’a été prise", précise-t-il. Mohamed Boudjellaba explique attendre depuis plus d’un an que l’Eglise lui présente des devis pour le retrait, avant de se prononcer. Le diocèse de Lyon s’est effectivement engagé à financer le remplacement des vitraux.
Après l'intervention de RMC, le diocèse a fini par contacter la mairie de Givors et un rendez-vous est fixé "dans les prochaines semaines". Annick est rassurée mais le combat n’est pas encore gagné.
"Les maires sont seuls"
Cette affaire pose la question, plus générale, des œuvres des artistes pédocriminels. Peut-on vraiment distinguer l'œuvre de l’artiste ? Faut-il retirer les productions ou carrément les détruire ?
L’association Be Brave France, qui se bat aux côtés du collectif des victimes du père Ribes, appelle l’État à se positionner clairement sur le sujet: "Les maires sont amenés à se dépatouiller seuls par rapport à ça et ce n'est pas normal", déplore Arnaud Gallais, le cofondateur de Be Brave France. "Au regard d'une réparation symbolique, et pour les victimes et l'ensemble de la société, l'Etat et le gouvernement devraient s'en saisir", ajoute-t-il.
Vendredi, il a lancé une pétition en ligne pour demander au maire de Givors de retirer les vitraux du prêtre pédocriminel Louis Ribes. 4.200 personnes l’ont déjà signé.