"Ça rappelle les heures les plus sombres de l’histoire": Ciotti perquisitionné pour des soupçons de fichage

Les locaux d'Éric Ciotti ont été perquisitionnés mardi à Nice dans le cadre d'une enquête ouverte sur des soupçons de fichage politico-sociologique de personnes, sans leur accord.
Une enquête préliminaire a été ouverte par le parquet de Nice en mai dernier du chef d'"enregistrement ou conservation de données à caractère personnel sensibles sans le consentement des intéressés", a précisé le procureur de la République de Nice, Damien Martinelli. Une plainte a été déposée.
"C'est discriminant"
Selon Libération, dans ces fichiers, Eric Ciotti et son équipe ont répertorié plusieurs centaines de Niçois influents, avec des caractéristiques décrites, telles que sur la confession des intéressés ("confession juive", "confession chrétienne"), des mentions de handicap ("sourd", "non voyant") ou encore de la mention "propriétaire foncier".
Un procédé, illégal s'il est fait sans le consentement de la personne, qu'ils ont justifié en expliquant que c'était "pour identifier des interlocuteurs sur des questions spécifiques".
Sur le plateau des Grandes Gueules, l'avis est presque unanime. Pour Élina Dumont, chroniqueuse et intervenante sociale: “Je trouve ça très choquant et grave, il y a 800 profils en tout, je ne vois même pas l’intérêt, à moins que ce soit des personnes vraiment influentes".
"Du clientélisme"
Bruno Poncet, cheminot, appuie ses propos: "C’est choquant, j'espère que la CNIL (NDLR la Commission nationale de l'informatique et des libertés) va se mettre un peu là dedans, c’est discriminant".
"À quoi ça peut entraîner ce genre de fichage? Est-ce qu’il sert en premier les Corses parce qu’il a peur d’eux, est-ce qu’il ne sert pas les mecs de gauche, les handicapés? C’est du clientélisme, ça commence comme ça, c’est sûrement pas le seul, ce n’est pas nouveau", questionne-t-il aux Grandes Gueules.
Et il prend en exemple son statut de délégué syndical: "quand t’as des élections tu n’as pas besoin de faire ça. Quand tu travaille tu connais déjà tes collègues".
Pour le chroniqueur Emmanuel de Villiers, noter la religion ou l’origine raciale, "c’est complètement anormal". "On ne peut pas formaliser dans une nomenclature l’origine raciale, ou que quelqu’un soit sourd etc", dénonce-t-il.
"Très de droite"
Mickaël, auditeur dans l'Oise, voit ça comme un "scandale", mais qui "n'est pas surprenant".
"C’est très de droite, ça ne doit pas avoir lieu, ça rappelle les heures les plus sombres de l’histoire, c'est du fichage point", pointe du doigt le responsable d’opération ferroviaire.
Selon lui, il faudrait au moins demander le consentement des personnes répertoriées, voire ne pas le faire du tout, qu'"il garde ça dans sa tête pour lui, on ne catégorise pas, on ne l’écrit pas noir sur blanc". Surtout que "ce fichier il tourne, obligatoirement", rajoute-t-il.
"Cest juste le boulot"
L'ancien conseiller politique d'Éric Zemmour, Antoine Diers, tient tout de même à nuancer. Il n'est pas du tout étonné: "C’est juste le boulot d’un cabinet politique, d’un élu, de savoir que tel électeur qu’il a croisé au marché lui a parlé de handicap. Si derrière la ville a une mesure sur le handicap autant lui écrire".
Autre exemple qu'il donne: "Juifs, chrétiens, catholiques, pour que l'élu annonce ses vœux au moment des fêtes, t’as besoin de faire un fichier". Ou encore: "Pour les propriétaires, quand tu vas baisser la taxe foncière, tu vas écrire aux propriétaires de ta ville".
"Je ne suis pas choqué du tout, on le fait tous dans les cabinets locaux et ministériels. C’est devenu interdit, sauf si tu déclares ton fichier auprès de la CNIL", explique Antoine Diers aux Grandes Gueules.
Ironiquement, il raconte que "si tu marques des indications dans les contacts de ton téléphone, tu as déjà un fichier que tu peux déclarer". Et pour rassurer, il assure que ces fichiers de citoyens "ne vont pas être vendus, on ne va pas envoyer des pubs ciblées, ce n’est pas une utilisation commerciale".