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Chronique d'une campagne anachronique

Le Parti Pris d'Hervé Gattegno, du lundi au vendredi à 8h20 sur RMC.

Le Parti Pris d'Hervé Gattegno, du lundi au vendredi à 8h20 sur RMC. - -

Dernier Parti pris avant le deuxième tour de l'élection présidentielle dimanche. C'est l'heure de faire le bilan de cette campagne. Un mot pourrait la définir : anachronique.

Il est temps qu’elle se termine cette campagne présidentielle. De bout en bout, elle aura été à côté de la plaque : une campagne à l’ancienne, dépassée sur la forme et sur le fond, décalée par rapport aux enjeux de la France et du monde. On nous a bassinés avec la crise mais les vrais sujets ont été escamotés : l’assainissement des finances publiques, la place de l’Etat dans un monde d’hyper-concurrence, les modèles de croissance dans des sociétés où l’écart se creuse entre les riches et les pauvres… Ces thèmes-là auraient dû dominer le débat. Eh bien on a plutôt parlé de la viande halal, des horaires des piscines, du nombre de profs par classe et des taux de TVA… Et l’essentiel a été survolé – ce qui ne veut pas dire que la campagne n’ait pas manqué de hauteur…

Pourtant, on a quand-même vu s’affronter deux politiques différentes, notamment dans le débat d’avant-hier entre N. Sarkozy et F. Hollande ?

C’est vrai mais le duel final n’efface pas le décalage qu’on a senti monter durant la campagne. L’antagonisme droite-gauche ne suffit plus à rendre compte des clivages qui traversent l’opinion. La preuve : les deux candidats qui ont animé, bousculé la campagne, M. Le Pen et JL Mélenchon, sont des candidats « anti-système », qui rejettent peu ou prou le fonctionnement de l’économie, de l’Europe et de la mondialisation. Ce courant-là, qui mêle le souverainisme et la revanche sociale, il traverse la droite et la gauche – mais il a disparu au soir du 1er tour. Pour les millions de Français qui croient en ces solutions radicales (un tiers des votes le 22 avril), la fin de campagne est forcément frustrante, et le résultat encore plus. Mais ils attendent déjà 2017.

En quoi la forme, aussi, de la campagne est apparue dépassée ?

A peu près en tout. Mis à part la primaire socialiste, qui est une vraie innovation politique – et dont il faut se rappeler qu’à l’origine, F. Hollande ne voulait pas –, le système tout entier a touché aux limites de la ringardise. Les 500 signatures ne veulent plus rien dire, l’égalité des temps de parole a poussé à son comble le délire normatif et la tradition courtelinesque ; et le débat télévisé de l’entre-deux tours a montré ses limites : trop long, trop formaté, trop ennuyeux. Il est urgent de dépoussiérer tout cela.

Un mot sur F. Bayrou : il a annoncé qu’il voterait pour F. Hollande. C’est un tournant ?

Disons un virage. Derrière l’appel grandiloquent au renouveau de la pratique politique, ça ressemblait surtout à la plus politicienne des offres de services. Au fond, l’attitude de F. Bayrou est à l’image de cette campagne : faussement moderne, nettement anachronique.

Ecoutez ci-dessous le podcast intégral du Parti Pris d'Hervé Gattegno ce vendredi 4 mai :

Hervé Gattegno