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Clearstream, trop tard pour la vérité !

« Le Parti pris » d'Hervé Gattegno, c'est tous les matins à 7h50 sur RMC du lundi au vendredi.

« Le Parti pris » d'Hervé Gattegno, c'est tous les matins à 7h50 sur RMC du lundi au vendredi. - -

Le procès en appel de l’affaire Clearstream s’ouvre ce lundi. Dominique de Villepin, qui a été relaxé l’an dernier, se retrouve sur le banc des accusés. Quelle que soit l’issue du procès, il est trop tard pour espérer la vérité.

Les politiques impliqués dans les « affaires » disent toujours : « Je fais confiance à la justice de mon pays ». En général, ils pensent exactement l’inverse. Il y a tout lieu de penser que c’est le cas dans l’affaire Clearstream, puisque c’est d’abord l’histoire d’une manipulation de la justice (avec des listings bancaires falsifiés pour compromettre des personnalités) puis une enquête et un procès sous pression, à partir du moment où l’implication de Dominique de Villepin est apparue. Le tout entremêlé de tant de mensonges, de trucages, de délires parfois, et de versions contradictoires, qu’aucune vérité n’apparaîtra plus jamais entièrement crédible.

Nicolas Sarkozy s’est désisté de sa constitution de partie civile. A-t-il eu raison ?

Il a surtout eu tort de ne pas le faire plus tôt. Dès qu’il est entré à l’Elysée, il était évident que sa présence dans le procès faisait peser un soupçon de partialité sur son déroulement et surtout sur son résultat. Comme en plus, Nicolas Sarkozy n’a pas cessé d’attaquer la magistrature sur tous les fronts depuis son élection, et que dans cette affaire Clearstream, il a tout fait pour qu’on pense qu’il exigeait une condamnation de son rival, la relaxe de Villepin est apparue au moins autant comme une manifestation de rébellion que comme un brevet d’innocence. Quoi qu’il se passe maintenant, cette impression ne se dissipera pas : que Villepin soit à nouveau relaxé ou qu’il soit finalement condamné, ceux qui le croient innocent resteront aussi convaincus que ceux qui sont sûrs qu’il est coupable.

Dans ces conditions, n'aurait-il pas été plus sage que le parquet renonce lui aussi à faire appel ?

Ce n’était pas un problème de sagesse mais de cohérence : le procureur avait demandé la condamnation de Villepin ; dès lors qu’il ne l’obtenait pas, il était logique de faire appel ; c’est ce que font tous les parquets, dans tous les dossiers. Cela dit, le choix de faire appel a forcément dû être approuvé par la chancellerie, donc par l’Elysée. Pour être clair, ça veut dire que Villepin aurait souhaité une intervention de Sarkozy sur le cours de la justice… mais en sa faveur. C’est cohérent avec ce que l’on sait de la vision de la justice de Villepin ; mais pas avec les grands discours de ses partisans sur l’indépendance des juges. Une illusion d’optique de plus dans cette affaire qui n’en manque pas…

Est-ce que la candidature de Villepin à la présidentielle dépend de ce procès ?

Forcément oui, mais dans quel sens ? Pour l’instant, la menace d’une candidature qui pourrait faire battre Sarkozy lui sert comme une arme de dissuasion, pour exiger de l’Elysée au moins une forme de neutralité. Si Villepin est innocenté, la voie sera dégagée pour lui mais ça ne fera pas de lui un favori pour autant. En revanche, s’il est condamné, il saisira la Cour de cassation, qui ne pourra pas statuer avant la présidentielle. A ce moment-là, on voit mal comment il ne maintiendrait pas sa candidature, quitte à jouer le tout pour le tout. Je ne suis pas sûr que ce soit le scénario préféré de Sarkozy !

Ecoutez «le parti pris» du lundi 2 mai avec Hervé Gattegno et Jean-Jacques Bourdin sur RMC:

Hervé Gattegno