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Crise agricole: "dispositif défensif" face à la menace d'un "siège" de Paris

Le ministre de l'Intérieur, Gerald Darmanin, après l'inauguration officielle du nouveau chef de l'unité d'élite de la police nationale RAID à Bièvres, le 12 janvier 2024.

Le ministre de l'Intérieur, Gerald Darmanin, après l'inauguration officielle du nouveau chef de l'unité d'élite de la police nationale RAID à Bièvres, le 12 janvier 2024. - Emmanuel Dunand / AFP

Gérald Darmanin a demandé aux responsables des forces de l'ordre de mettre en place "un dispositif défensif important afin d’empêcher tout blocage" par les agriculteurs du marché de Rungis, des aéroports franciliens et "d'interdire toute entrée dans Paris", a annoncé le ministère de l'Intérieur.

Le gouvernement a promis dimanche un "dispositif défensif important" face à la volonté d'agriculteurs d'entamer un "siège" de Paris à partir de lundi, tandis que la FNSEA a appelé au "calme" mais prévenu que la mobilisation de la profession resterait "totale".

Alors que le Premier ministre Gabriel Attal, de retour sur le terrain, a juré "d'avancer vite" pour répondre à la colère des agriculteurs, le président du premier syndicat agricole français a exhorté le gouvernement à "aller beaucoup plus loin".

"On n'a pas bien vécu ce qui s'est passé la semaine dernière: la com', les caméras, le ballot de paille et tout ça, ce n'est pas notre truc. Ce qu'il nous faut nous, c'est des décisions dont on sent qu'elles changent le logiciel", a lancé Arnaud Rousseau face à des paysans bloquant l'autoroute A16 à la hauteur de Beauvais (Oise).

Malgré une accalmie, de nombreuses liaisons routières sont restées coupées dimanche, de la Normandie au Gard en passant par les Pyrénées-Atlantiques et la Meuse.

La situation menace de se tendre encore avec un projet de blocage d'accès à Paris lundi à partir de 14H.

"Tout va s'organiser dans la sécurité autour de plusieurs points de blocage sur des axes stratégiques autoroutiers importants, il va y avoir sept points de blocage tout autour de Paris", qui seront tenus "par des tracteurs, des agriculteurs", a affirmé Clément Torpier, président des Jeunes Agriculteurs Ile-de-France, sur BFMTV.

Selon lui, "il va y avoir une organisation militaire, il est hors de question qu'un nouvel accident arrive" après celui qui a coûté la vie à une agricultrice et sa fille en Ariège.

Le ministre de l'Intérieur Gérald Darmanin, qui organise dimanche soir une réunion interministérielle de crise, a demandé dimanche aux responsables des forces de l'ordre de mettre en place "un dispositif défensif important afin d'empêcher tout blocage" par les agriculteurs du marché de Rungis, des aéroports franciliens et "d'interdire toute entrée dans Paris", selon son ministère.

Dès le début de soirée, des forces de l'ordre dont des blindés de la gendarmerie ont été déployées aux abords de Rungis, a constaté un journaliste de l'AFP. Mais "la posture reste la même: les forces de l'ordre doivent agir avec grande modération", a-t-on expliqué place Beauvau.

Et la mobilisation devrait reprendre tôt lundi autour de Lyon, selon la préfecture du Rhône, qui a évoqué une opération escargot venue des Monts du Lyonnais puis des blocages d'autoroutes. Les branches locales de la FNSEA et les JA ont promis "des ramifications partout dans la région".

Selon Arnaud Rousseau, la séquence qui s'ouvre est celle d'une "semaine de tous les dangers, soit parce que le gouvernement ne nous entend pas, soit parce que la colère sera telle qu'ensuite chacun prendra ses responsabilités".

De son côté, Gabriel Attal a concédé "que, à travers ces premières mesures (annoncées vendredi), on n'a pas répondu encore à tout ce que je viens d'évoquer et ce qui constitue le malaise et le mal-être de nos agriculteurs aujourd'hui".

"Et je suis résolu à avancer, avancer résolument, à avancer vite", a déclaré le Premier ministre à La Riche (Indre-et-Loire). Peu auparavant, dans une ferme au nord-est de Tours, Gabriel Attal a été interpellé sur de multiples volets de la crise: baisse des revenus, retraites faibles, complexité administrative, inflation des normes, concurrence étrangère...

"Je veux qu'on clarifie les choses et qu'on voie les mesures que l'on peut prendre, supplémentaires, sur ces histoires de concurrence déloyale", a assuré le chef du gouvernement.

"Je lui confirme, il faut aller beaucoup plus loin", a répondu Arnaud Rousseau, qui a présenté des dizaines de doléances au gouvernement cette semaine: "tant que ces demandes ne seront pas satisfaites, la mobilisation sera totale", a-t-il dit.

Gabriel Attal a dévoilé vendredi des mesures d'urgence, dont l'abandon de la hausse de la taxe sur le gazole non routier (GNR), des indemnités gonflées pour les éleveurs dont les bovins ont été touchés par la maladie hémorragique épizootique, des sanctions lourdes contre trois industriels de l'agro-alimentaire ne respectant pas les lois Egalim sur les prix.

Mais le président des Républicains Eric Ciotti a jugé ces réponses "ridiculement faibles" et plaidé, dans un entretien au Journal du Dimanche, pour un revenu minimum net mensuel des agriculteurs de 1.500 euros.

De son côté, en déplacement dans une exploitation agricole à Radinghem-en-Weppes (Nord), la cheffe de file de l'extrême droite, Marine Le Pen, a dénoncé la politique agricole du gouvernement. "Ils ne remettront pas en cause le modèle" qu'ils soutiennent "au niveau de l'Union européenne", "qui est un modèle qui tue l'agriculture", a-t-elle dit, estimant qu'il fallait "sortir l'agriculture des accords de libre-échange".

Exaspérés comme leurs voisins français par une politique agricole commune européenne selon eux déconnectée du terrain, des agriculteurs belges ont bloqué dimanche une autoroute dans le sud de leur pays. Des paysans se sont également mobilisés dernièrement en Allemagne, en Pologne, en Roumanie et aux Pays-Bas.

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RMC avec AFP