Gouvernement: "Pour Michel Barnier, c’est le RN ou rien", l’avis tranché d’Arthur Chevallier

Le moins qu’on puisse dire, c’est que le gouvernement est bien à droite. Mais ce n’est même pas sûr que cela suffise… Car Michel Barnier va devoir aller toujours plus à droite. A ce stade, il ne s’agit même plus de politique, mais de mathématiques. Avoir un gouvernement avec des ministres de droite ne va pas suffire. Maintenant, il va falloir gouverner à droite, et même très à droite. Si le gouvernement ne veut pas se prendre une motion de censure dans trois semaines, il a besoin du Rassemblement national. Et si la gauche trouve ce gouvernement trop conservateur, elle n’avait qu’à y participer. Elle a refusé. Michel Barnier n’a donc plus qu’un choix: c’est le RN ou rien.
Il gouverne aussi avec Ensemble pour la République, le groupe d’Emmanuel Macron. Mais je ne suis pas sûr que ça les gêne tant que ça. Entre nous, les macronistes sont les derniers à croire qu’ils sont encore de gauche. La réforme des retraites et la loi immigration, c’était eux. Et quand votre aile gauche est incarnée par Elisabeth Borne, ça veut tout dire. Arrêtons la langue de bois: Emmanuel Macron a volontairement choisi de s’adresser à la droite depuis 2022. Maintenant, il faut qu’il aille au bout de cette logique et qu’il fasse plaisir à son public. Un public qui attend des réponses en matière de sécurité, de pouvoir d’achat et d’immigration. Tant que le gouvernement n’y répond pas, les électeurs continueront à fuir la droite pour l’extrême droite. Sur ces sujets, on est dans le déni.
Le RN n'osera pas censurer un gouvernement de droite soutenu par les Français
Le centre et la droite se sont-ils donc alliés pour appliquer le programme de l’extrême droite? Disons plutôt qu’ils n’ont pas le choix. Michel Barnier vient d’un parti qui a 47 députés. C’est quand même très peu. Alors, avec les députés macronistes, ça fait certes 213. Mais on est loin d’une majorité absolue. Il faut donc le soutien d’un autre bloc, et c’est le RN qui paraît quand même le plus proche. Personne n’a oublié qu’avant la dissolution, la droite ne voulait pas s’allier avec Emmanuel Macron. L’alliance d’aujourd’hui a donc l’air contre nature. Pour les électeurs du RN et du Nouveau Front populaire, ça ressemble à une petite magouille entre amis qui leur permet de garder le pouvoir. Michel Barnier devra faire mentir ces accusations. Et il est déjà sous la pression. Regardez quand il a annoncé des possibles hausses d’impôts: toute la droite, de Gabriel Attal à Marine Le Pen, a menacé de le lâcher immédiatement. Autre exemple: Laurence Garnier, ancienne militante de la Manif pour tous. Dès qu’il a été question de ne pas la prendre au gouvernement, la droite s’est mise à hurler.
Michel Barnier a très peu de marges de manœuvre. Il est confronté à des électeurs de droite qui ont changé. On n’est plus sous Nicolas Sarkozy ou Jacques Chirac, quand il suffisait au président d’aller dans un commissariat, de serrer la main des policiers et de baisser les impôts pour faire plaisir à tout le monde. Aujourd’hui, il y a moins d’argent et plus de problèmes. Et le RN s’est emparé de beaucoup sujets. La seule façon de les vaincre, c’est de montrer qu’on s’en occupe mieux qu’eux. Si Michel Barnier y arrive, il peut devenir populaire, et la popularité, c’est la seule chose qui pourra le protéger de Marine Le Pen. Le RN n'osera pas censurer un gouvernement de droite soutenu par les Français. Mais pour ça, le Premier ministre doit conquérir un nouveau public. Et a priori, ce n’est pas celui de la fête de l’Huma. Alors ça ne fait pas rêver, mais en acceptant de devenir Premier ministre, Michel Barnier savait pour quoi il signait.