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Le "nouveau schéma d'intervention" de Bernard Cazeneuve va-t-il relancer la guerre des polices ?

REACTIONS - Bernard Cazeneuve dévoile ce mardi un nouveau "schéma d'intervention" pour coordonner l'action des unités d'élite des forces de l'ordre pour faire face à des attentats de masse semblables à ceux du 13 novembre. L'une des principales nouveautés étant que les forces d'élite doivent être "situées à 20 minutes de distance" de n'importe quel point du territoire en cas de crise grave ou d'attentat.

Comment faire face de manière plus efficace à un attentat de masse ? Le ministre de l'Intérieur Bernard Cazeneuve dévoile mardi un nouveau "schéma d'intervention" pour coordonner l'action des unités d'élite des forces de l'ordre, appelées à faire cesser leurs rivalités. L'idée est simple: promouvoir une force d'élite décentralisée, prête à intervenir partout en France. Si pour le moment, seule Paris a été la cible d'attentat de masse, tout le territoire est menacé. Et dans le cas d'attentats comme le 13 novembre, chaque minute compte.

Alors, le ministère de l'Intérieur prévoit de déployer des unités d'élite dans les grandes villes comme Nantes, Tours, Reims, Montpellier… Au total, une quinzaine de nouvelles antennes régionales du GIGN et du Raid devraient voir le jour. Concrètement, avec ce nouveau "schéma d'intervention", les forces d'élite doivent être "rapides" et "situées à 20 minutes de distance" de n'importe quel point du territoire en cas de crise grave ou d'attentat.

"Il y a eu de graves dysfonctionnements"

Une bonne nouvelle pour Patrick Jardin qui a perdu sa fille Nathalie dans la tuerie du Bataclan, le 13 novembre dernier. Ce jour-là, les forces de l'ordre avaient mis plus de deux heures avant d'intervenir. "Des délais d'intervention de 2h15, c'est inadmissible surtout quand on sait que c'est à cause d'une simple guerre des polices. S'ils étaient intervenus en 15-20 minutes, on n'aurait peut-être pas déploré 90 morts mais que 30", estime-t-il.

"Il y a eu de graves dysfonctionnements et ces dysfonctionnements ont coûté la vie à des personnes et par conséquent j'attends que M. Cazeneuve prenne des positions dures et radicales, ajoute-t-il. Il doit exiger des chefs que cela ne se passe plus". Pour sa part, Frédéric Gallois, ancien patron du GIGN, juge que l'annonce d'une intervention dans un délai de 20 minutes des unités d'élite sur n'importe quel lieu du territoire est un peu ambitieuse. "On ne peut pas assurer à 100% qu'en 20 minutes on puisse projeter des unités spécialisées mais cela reste un objectif, déclare-t-il. On sait qu'aujourd'hui il n'est pas possible de mettre des unités spéciales dans toutes les villes essentiellement par manque de moyens. Mais je pense que le dispositif va monter en puissance".

"Ce n'est pas la bonne solution"

Si Bernard Cazeneuve veut dépasser les frontières traditionnelles zones urbaines/zones rurales attribuées aux policiers du Raid et aux gendarmes du GIGN pour plus de coopérations entre les deux services, pour Amaury de Hauteclocque, ancien patron du Raid, c'est justement le meilleur moyen d'attiser une guerre de territoire. "Ce n'est pas la bonne solution, assure-t-il. Je pense que l'on va détruire ce qui fonctionnait bien".

Et de rappeler: "La police est compétente pour toutes les zones de plus de 20.000 habitants et la gendarmerie pour celles de moins de 20.000 habitants. Au final (avec ce nouveau schéma d'intervention, ndlr), c'est le premier qui sera arrivé sur les lieux qui sera saisi. Ce qui à terme va donner lieu à un jeu pervers et à des facteurs qui vont devenir dangereux avec une mauvaise compétition et une course à l'échalote par rapport à l'événement".

Maxime Ricard avec Marion Dubreuil