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McKinsey: ce qu'il faut savoir sur l'affaire qui secoue le gouvernement

L'abus de recours à des cabinets de conseil et le fait que l'un d'entre eux, l’Américain McKinsey, ne paye pas d'impôt en France, font tache à quelques jours du premier tour de la présidentielle.

Le gouvernement affirme n’avoir rien à cacher dans l’affaire des cabinets de conseil McKinsey, ce possible scandale qui monte à quelques jours du premier tour. La première affaire a été révélée à la mi-février par la publication du livre “Les infiltrés”, écrit par deux journalistes de L’Obs.

L'enquête avançait le chiffre de 1,5 milliard d’euros au minimum versés en 2020 à ces cabinets de conseil privés. Les auteurs dénonçaient un “putsch rampant” de ces consultants qui se sont installés au cœur de l'État.

Le livre donne des exemples frappants. Comment le ministère de la Santé fait appel au privé pour simplement compter les masques dont on disposait au début de la pandémie. Ou bien comment le ministère de la Défense demande conseil à des cabinets américains pour élaborer sa stratégie militaire, au risque de dévoiler des secrets-defense.

Les profs ont aussi appris avec amertume que l’on a dépensé des millions pour de fumeux rapports sur l’avenir du métier d'enseignant. Ce ne sont que quelques exemples de ce qu’on pourrait appeler une dérive.

Pas d'impôts sur les sociétés payés en France, contrairement aux affirmations d'un dirigeant

Une commission d'enquête du Sénat a ensuite révélé que le cabinet McKinsey ne paie pas l'impôt sur les sociétés. C’est l’affaire dans l’affaire, celle qui est en train de tourner au scandale, sans doute parce que c’est beaucoup plus facile à comprendre. Interrogé sous serment au sénat, un des dirigeants de McKinsey avait juré: “Je le dis nettement, nous payons nos impôts en France”. Les sénateurs sont allés vérifier à Bercy. C’est faux. La filiale française de McKinsey n’a payé aucun impôt sur les sociétés depuis dix ans.

Les sénateurs ont saisi le parquet pour suspicion de faux témoignage sous serment. Pour l'instant, le parquet national financier ne semble pas pressé d’ouvrir une enquête. Sur ce volet fiscal, il y a donc deux sujets, deux questions qui se posent. Est-ce que McKinsey a fraudé depuis dix ans? Est-ce qu’un dirigeant du cabinet a menti pour le cacher.

Cela fera l’objet d’une enquête du fisc; qui est en cours, et sans doute d’une enquête pénale. Cela fait mauvais genre pour une entreprise qui travaille pour l'État.

L'affaire est devenue très politique

A quelques jours du premier tour, toutes les oppositions dénoncent un scandale d'État. Et soulignent que plusieurs membres de l’état-major de McKinsey se sont investis à titre personnel dans la campagne d’Emmanuel Macron en 2017. Laissant entendre que le recours aux cabinets conseil aurait été une sorte de renvoi d’ascenseur.

Le gouvernement a prévu une conférence de presse qui était prévue ce jeudi et qui s’est tenue mercredi soir pour tenter d'éteindre l’incendie. Deux ministres, Amélie de Montchalin et Olivier Dussopt, ont allumé des contre-feux. Ils ont dénoncé une campagne politique et ils ont affirmé: “Nous n’avons rien à cacher, nous avons toujours respecté les règles”.

Mais en même temps, ils reconnaissent un problème puisqu’ils promettent à l’avenir de moins faire appel à ces cabinets-conseil. L’objectif est de réduire de 15% les sommes consacrées. Sur la possible fraude fiscale, les ministres indiquent qu’une enquête est en cours et que s’il y a eu des irrégularités, il y aura des sanctions et des redressements. Pas sûr que cette prestation de mercredi soir suffise à mettre un terme au scandale.

Nicolas Poincaré (édité par J.A.)