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Nouvelle-Calédonie: qu’est-ce que le CCAT, le groupe dans le viseur des autorités?

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Qualifié d’organisation "mafieuse et violente", le CCAT est visé par une enquête en Nouvelle-Calédonie après les émeutes de la semaine dernière.

En Nouvelle-Calédonie, un mouvement indépendantiste, le CCAT, est dans le viseur des autorités. Une enquête a été ouverte par le parquet de Nouméa contre ce groupe accusé d’avoir commandité les violences, pour des faits d’association de malfaiteurs et de vol, dégradation et incendie en bande organisée. Le procureur entend identifier et poursuivre les commanditaires des émeutes qui agitent l'archipel depuis huit jours. Et il ne cache pas que parmi ces commanditaires, se trouvent un certain nombre de dirigeants de la CCAT, la cellule de coordination des actions de terrain. Le procureur les accuse d’avoir tiré les ficelles, poussé certains jeunes à la radicalisation violente et donné des objectifs aux émeutiers. Une dizaine de dirigeants de cette organisation ont déjà été assignés à résidence chez eux, dans le cadre de l’état d’urgence qui a été décrété mercredi dernier. Assigné à résidence, cela veut dire qu’à ce stade, ils ne sont ni en garde à vue, ni mis en examen.

Catégorique, le ministre de l'intérieur, Gérald Darmanin, qualifie ce mouvement de "mafieux". Le problème, dit-il, c'est la CCAT: "C’est une organisation mafieuse et violente, qui pille des magasins et qui tire à balle réelle sur les gendarmes". Le représentant du ministère de l'Intérieur sur place ne dit pas autre chose. Louis Le Franc, le haut-commissaire, dénonce une organisation de voyous qui a la volonté de tuer des policiers et des gendarmes. Et que ceux qui sont à la tête de cette cellule sont tous responsables et devront être jugés.

Un mouvement assez récent

Que sait-on exactement de ce mouvement? Qu’il est assez récent et qu’il a été créé pour s’opposer à la fameuse loi sur la fin du gel du corps électoral. La loi que les indépendantistes ne veulent pas et qui a mis le feu aux poudres il y a huit jours… Le parti indépendantiste historique en Nouvelle-Calédonie, c’est le FLNKS, le front de libération national kanak socialiste. Il a été créé lors des premières grandes émeutes de 1984, et c’est le rassemblement de quatre partis et syndicats. Sauf que le FLNKS, de par ses statuts, ne peut pas s'élargir à d’autres mouvements plus récents.

A la fin de l’année dernière, les indépendantistes ont donc décidé de créer cette cellule, pour regrouper tous les mouvements qui se préparaient à lutter contre la loi modifiant le corps électoral. Plus qu’une organisation mafieuse, c’est plutôt une nébuleuse de mouvements, parmi lesquels se trouvent effectivement des radicaux décidés à en découdre, mais aussi des modérés et même des religieux catholiques et protestants.

Les premières manifestations de la CCAT se sont d’ailleurs déroulées dans le calme. Le 13 avril, la cellule d’action avait appelé à une première manifestation contre la réforme électorale qui a réuni plusieurs dizaines de milliers de personnes à Nouméa. Et tout s’est déroulé dans une ambiance bon enfant. Puis le 13 mai, le jour de l’examen de la loi à Paris, plusieurs milliers de personnes se sont de nouveau rassemblées au départ dans le calme. Mais on connaît la suite, malheureusement. Dans la soirée, tout a basculé avec des morts, des pillages, des incendies…

Les jeunes émeutiers armés, violents et alcoolisés, étaient-ils hors de contrôle ou bien manipulés par des leaders syndicaux? C’est pour l'instant difficile à dire. Il y a des responsables indépendantistes qui ont jeté de l’huile sur le feu et appelé à la guerre civile. Mais le journal “Le Monde” raconte qu’il y a aussi eu des responsables de la CCAT qui ont tenté de ramener le calme et de ramener les émeutiers chez eux. Le mouvement aurait donné comme consigne de détruire les bouteilles d’alcool pillées dans les magasins, pour que les jeunes cessent de boire… L'enquête judiciaire devra déterminer qui a fait quoi. Et s’il y a vraiment une organisation “mafieuse” qui a commandité ces violences.

Nicolas Poincaré