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Surloyer plus strict, expulsion plus rapide… Le gouvernement veut durcir les règles pour les HLM

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Le ministre du Logement, Guillaume Kasbarian, veut durcir les conditions pour se maintenir dans les logements sociaux quand les revenus des bénéficiaires augmentent.

Comment résoudre la crise du logement? Le gouvernement présente ce vendredi son projet de loi en Conseil des ministres, porté par Guillaume Kasbarian, ministre du Logement. Un texte destiné à relancer la construction, mais qui prévoit aussi de durcir les conditions pour se maintenir dans les logements sociaux, pour pouvoir désengorger les HLM. Un projet déjà dénoncé par les associations comme une forme de "chasse aux pauvres".

Au-delà d'un certain seuil de revenus, les locataires verront le prix de leur loyer augmenter. Et si leurs revenus augmentent davantage, ils seront même amenés à devoir quitter leur logement pour laisser la place à un autre locataire qui gagne moins bien sa vie. Selon le ministre, parmi les 11 millions de personnes vivant dans un logement social en France aujourd'hui, 8% d'entre eux n'y seraient plus éligibles parce que leurs revenus dépassent le plafond autorisé.

Dans le document transmis aux acteurs du logement, le ministère assume: il s’agit d’inciter à plus de "mobilité". En clair, forcer les familles à libérer leur HLM lorsqu’elles ne remplissent plus les conditions. Première étape: le supplément de loyer s’appliquera dès l’instant où les revenus dépassent le plafond de ressources. Aujourd’hui, il ne se déclenche que 20% au-dessus. Deuxième étape: l’expulsion. Là aussi, le seuil sera abaissé, pour qu’elle soit possible plus vite.

De quoi "faciliter l’expulsion de 400.000 locataires", alerte la CLCC, comme d’autres associations, qui dénoncent une mesure anti-pauvres qui ne règlera rien au problème de fond: le manque d’investissement dans la construction. Au gouvernement, on répond que le texte doit aussi permettre de développer des logements intermédiaires abordables pour les classes moyennes, pour réserver les logements sociaux aux plus modestes.

"Vous n’aurez que de la ghettoïsation"

Pour les locataires de HLM, cette loi pourrait permettre de libérer des places plus rapidement. Au pied de l'immeuble dans lequel il a emménagé il y a dix jours, Karim, bientôt retraité, est soulagé. Il a attendu plusieurs années pour obtenir ce logement social. Mais, "si on réussit dans la vie, il faut céder la place à ceux qui n’ont pas réussi, il faut déménager", estime-t-il.

A quelques pas, Sylviane promène son chien. Elle habite dans cette résidence HLM depuis 40 ans. Alors, partir du jour au lendemain si son niveau de vie s'élevait, pas question. "Je paye mon loyer. Il y a des gens qui ne payent pas leur loyer. En fait, on nous dégage, on jette les gens qui sont sincères et qui sont des bons payeurs" dénonce-t-elle. D'autant qu'ici, même si certains dépassent les critères d'accès à un logement social, personne ne roule sur l'or. Si c’était le cas, "je serais très certainement au soleil avec un petit pavillon" explique Sylviane.

Empêcher la mixité sociale, c'est la crainte des associations qui jugent contreproductive cette proposition de loi. "Si vous faites fuir les classes moyennes, vous n’aurez que de la ghettoïsation et une concentration de pauvreté. Et si vous avez des loyers plus faibles, moins bien payés, vous aurez moins d’entretien, de maintenant, de rénovation…", souligne Guillaume Aichelmann, en charge du logement pour la CLCV. 400.000 locataires pourraient être contraints de quitter leur appartement, alerte l'association.

LP avec Sébastien Krebs et Mahauld Becker-Granier