Sarkozy a intérêt à soigner sa sortie

Le Parti Pris d'Hervé Gattegno, du lundi au vendredi à 8h20 sur RMC. - -
C’est évident depuis dimanche soir – c’était clair dans son discours, quand il a interdit qu’on siffle François Hollande ; ça l’est encore plus avec cette invitation à « coprésider » ce matin : il y a, chez Nicolas Sarkozy, une envie et même un besoin de se montrer élégant dans la défaite. Pour ne pas abîmer les quelques jours qui lui restent à l’Elysée, pour finir sur une bonne impression, après toutes les avanies qu’il a subies (et parfois méritées) durant sa présidence. Et sans doute pour prendre à contre-pied, justement, ses détracteurs. Lui qui a si souvent été présenté comme le diviseur des Français – et pas toujours à tort – il veut se montrer en rassembleur. L’armistice est une date idéale pour cela. François Mitterrand avait fait la même chose avec Jacques Chirac en 1995, et Jacques Chirac avec lui en 2007. Et il y avait plus de haine entre eux que Nicolas Sarkozy n’en éprouve pour François Hollande…
C’est d’abord en pensant à son image personnelle que Nicolas Sarkozy s’apprête à quitter le pouvoir ?
Oui. C’est l’épilogue logique d’une présidence ultra-personnalisée, jusqu’à l’égocentrisme – et François Hollande lui-même aura du mal à résister à la malédiction du présidentialisme. C’est aussi l’aboutissement d’un quinquennat où Nicolas Sarkozy a voulu décider de tout ; assumer seul son échec, c’est cohérent. Et puis la fin de campagne a été dure, il a dû aller très loin, trop loin sans doute, pour reconquérir une part des électeurs de Marine Le Pen – et ce faisant, il a heurté beaucoup de Français, y compris à droite. Par moment, il a frôlé l’indignité ; il se devait de retrouver de la dignité. Qu’il utilise ses derniers jours au pouvoir pour le faire, c’est heureux pour lui et c’est bon pour les Français.
Il a dit – ici même – qu’il quitterait la politique s’il était battu. Tiendra-t-il parole ?
Plutôt. Nicolas Sarkozy veut éviter l’« effet Giscard » : à la fois pour ne pas sortir sous les huées et pour ne pas donner de lui l’image d’un homme qui s’accroche au pouvoir, ou plutôt à l’espoir de le reconquérir. Sans doute qu’il ne veut pas non plus suivre l’exemple de L. Jospin, qui avait laissé le PS en état de choc en 2002. Lui exhorte les chefs de l’UMP à rester unis: c’est plus facile à dire qu’à faire, mais c’est la seule attitude raisonnable pour limiter la casse aux législatives ; et c’est en même temps renvoyer à plus tard le bilan critique sur sa stratégie de « droitisation ». Prendre la pose du vaincu honorable, c’est dissuader les partisans du « droit d’inventaire » de se mettre d’accord sur son dos. Il n’y a donc pas que de l’élégance dans tout cela ; c’est tactique, c’est intéressé, c’est égoïste. C’est la preuve que pour une petite semaine, Nicolas Sarkozy fait encore de la politique.
Ecoutez ci-dessous le podcast intégral du Parti Pris d'Hervé Gattegno ce mardi 08 mai :