Condamné parce que ses vaches gênent ses voisins: "C'est normal qu'il y ait des vaches à la campagne, non?"

Panneau installé sur une des maisons qui jouxte l'exploitation mise en cause par la justice. - DR - Stéphanie Fourcat
Stéphanie Fourcat, membre du comité de soutien, qui a lancé une pétition de soutien à Nicolas Bardy, l'agriculteur de 37 ans, qui a repris l'exploitation de ses parents au hameau de Jallès (Cantal) en 2002, et condamné par la justice à construire un nouveau bâtiment pour accueillir ses 18 vaches. Une décision qui met en péril son exploitation.
"Ce couple de retraités de Saint-Etienne est revenu s'installer dans leur maison familiale, dans le hameau. Ils se disent gênés par l'odeur des vaches. Je suis à égal distance qu'eux de la fosse à fumier de notre voisin agriculteur. Le vent tourne, donc si vraiment il y avait des odeurs nous serions nous aussi importunés. Il n'y a d'ailleurs que ce couple qui se dit gêné, alors que l'exploitation est entourée de plusieurs habitations, dont la mienne. Ce n'est pas que je la supporte cette odeur, c'est que je ne la sens pas. Dans notre village, il y a des vaches, il y a des mouches, il y a des coqs qui chantent… c'est la campagne, quoi!
"Moi, je ne la sens pas cette odeur"
C'est un acharnement. Cela a commencé en 2009. Ce couple de retraités a d'abord demandé l'évacuation des ballots de paille qui sentaient mauvais soi-disant. C'est allé en conciliation, et l'agriculteur les a déplacés. Mais un mois après, il recevait un courrier recommandé dans lequel ses voisins se plaignaient cette fois de l'odeur du fumier. L'hiver, Nicolas, l'agriculteur, met ses vaches à l'abri dans une étable. Mais tous les jours le fumier est sorti du village par l'agriculteur, donc il ne stagne pas dans l'exploitation. Ils ont pourtant porté cela devant la justice et ont fini par gagner en appel.
Les conséquences sont dramatiques pour cet éleveur. Depuis cette décision de justice, il n'a plus le droit de mettre ses vaches dans l'étable l'hiver. Parfois il fait -15, -20°… on ne laisse pas les bêtes dehors, surtout quand elles sont prêtes à vêler. Il est au cœur du village, donc il ne peut pas faire d'aménagements. Quoi qu'il déplace, il sera toujours à moins de 50 mètres d'une maison (la distance légale, NDR). Il faudrait qu'il construise un autre bâtiment en dehors du hameau, mais c'est un coût financier qu'il ne peut pas assumer.

"Les vaches dehors par -15 ou -20"
Depuis, quasiment tous les habitants du hameau sont mobilisés. Les plus proches voisins de Nicolas, comme moi, ont mis des panneaux sur leurs maisons. On est plusieurs voisins à avoir également monter un comité de soutien. On trouve cela tellement injuste de jouer avec la vie d'une famille. Nicolas, l'agriculteur, a 37 ans, est marié et a un petit garçon. Il a des dettes pour financer son exploitation et on joue avec son avenir, là. C'est la mort de la ferme.
Une affaire comme ça fera jurisprudence. Il y a pleins d'exploitations en France qui sont au centre d'un village et qui sont à moins de 50 mètres d'une maison. Ça peut donner des idées à d'autres voisins. Si on fait taire les cloches, les coqs et que maintenant on renvoie les vaches dès qu'une odeur nous gêne…"